Le Sauvignon blanc

C’est un cépage que j’aime beaucoup, capable du pire comme du meilleur. Et c’est bien sûr du second dont il sera question ici !

Le Sauvignon est aujourd’hui cultivé dans de très nombreux vignobles de la planète.

En France, ses régions de prédilection sont la Loire et le Bordelais. Dans la première, le Sauvignon règne en maître — il est vinifié seul — en Touraine, dans les appellations de Reuilly, Quincy, Menetou-Salon, à Pouilly-Fumé mais aussi à Sancerre, où il est connu pour sa minéralité et où il peut atteindre des prix particulièrement élevés. Dans la seconde, il est le cépage de référence pour les vins blancs secs. Son acidité et sa fraîcheur sont parfois associées au Sémillon et à la Muscadelle.

Le Sauvignon se distingue par un bouquet très parfumé et un arôme en particulier : le bourgeon de cassis (on utilise aussi le descripteur buis). Quand il n’est pas à maturité, il est plus herbacé, proche du genêt (ou encore … pipi de chat !).

Il est devenu la première variété plantée en Nouvelle-Zélande, où le style des Sauvignons de la région de Marlborough, davantage sur le fruit que ceux de la Loire, s’est exporté dans le monde entier, y compris en France.

La sélection Vins d’Avenir compte trois vignerons qui produisent du Sauvignon dans trois appellations différentes, trois expressions très différentes du même raisin. Je les ai interrogé pour percer les mystères de ce cépage si aromatique.

Monique Bonnet, au Château Suau, m’explique : « L’assemblage à Bordeaux n’est pas obligatoire pour le Sauvignon, mais, en ce qui nous concerne, nous sommes sur un terroir argileux où nous n’avons pas la minéralité d’un Sauvignon de Sancerre. Le Sauvignon est un cépage très aromatique avec beaucoup d’éclat et l’assemblage va permettre d’ajouter un peu de gras, de matière, et donc d’équilibre ».

En Touraine, au Clos Roussely, le Sauvignon représente 70% de l’encépagement en blanc. Vincent Roussely décline ce cépage dans plusieurs cuvées, notamment Touraine Chenonceaux, Le Clos et Irréductible. Bien que les sols soient identiques ­— le tuffeau très calcaire caractéristique de la région ­— elles sont toutes différentes. Il y a plusieurs explications, me raconte Vincent : « D’abord, l’âge des vignes : 30 ans en moyenne pour Le Clos, 40 pour le Touraine Chenonceaux et 60 pour Irréductible. Les rendements ne sont donc pas les mêmes, la complexité aromatique non plus. Ensuite, la vinification. Pour Le Clos, la fermentation et l’élevage ont lieu dans de très vieilles cuves en tuffeau creusées il y a 250 ans et doublées d’un revêtement en inox. Elles bénéficient d’une importante inertie thermique, le but étant de garder la pureté du fruit. Pour Irréductible, vinifiée en levures indigènes et sans soufre, Vincent alterne trois types de vinifications différentes. « Je crois beaucoup aux synergies, à l’association des gens, des genres et des personnalités. Au domaine, nous travaillons des éco-paturages, avec des chèvres, des chevaux et des ânes. C’est aussi ce que j’ai essayé de faire avec cette cuvée. » Un tiers est vinifié en amphores qui apportent une oxydation ménagée et une certaine complexité aromatique. Un tiers en cuves ovoïdes qui favorisent les échanges avec les lies et un tiers dans des pièces en chêne de 400 litres qui apportent de la complexité et de la structure. » Le résultat est bluffant, loin des marqueurs classiques du Sauvignon. « Oui, c’est très iconoclaste de vinifier comme ça un Sauvignon ! » s’amuse Vincent Roussely.

Au domaine Delacroix Kerhoas, le Sauvignon est cultivé en plaine et sous le soleil du sud. Là encore, c’est un autre profil de vin qui se dessine. « Le Sauvignon se plaît sur les sols « poussants » m’explique Thibault Kerhoas. Je mets beaucoup de soin en cave pour produire cette cuvée. C’est une sélection parcellaire, vinifiée dans une cuve, qui ne m’a jamais posé de problème : c’est un vin qui fonctionne presque à tous les coups. » En effet, le terroir rhodanien permet au Sauvignon d’exprimer des arômes exotiques que l’on ne retrouve pas ailleurs en France et qui rappellent le style néo-zélandais : des notes de fruits de la passion, de mangue, toujours soutenues par une belle acidité qui rend cette cuvée irrésistible.
Vous l’aurez compris, même si les marqueurs variétaux sont importants, le Sauvignon s’adapte à son terroir mais aussi à son vigneron. Vous en trouverez donc pour tous les goûts, ou presque.

Flacons, nouvelle cave nîmoise originale

Il y a dix-huit mois une nouvelle cave ouvrait à Nîmes. Flacons, c’est son nom, est un lieu moderne et convivial situé au 14 boulevard Gambetta. Cette cave à vins et à bières est née de l’association de Céline Cools et de Simon Poussielgues. Tous les deux baignent dans le monde du vin depuis longtemps.

« Mon père était expert-comptable spécialisé dans le domaine viticole. C’est lui qui m’a initié. La mère de ma fille est vigneronne à Châteauneuf-du-Pape et j’ai monté plusieurs affaires dans la restauration. Bref, j’ai toujours plus ou moins baigné dedans. » m’explique Simon. Globe-trotter à la fibre entrepreneuriale, Simon a voyagé en Afrique, en Espagne au Maroc avant de revenir à Nîmes pour se lancer dans ce nouveau projet : « j’ai racheté un stock de vins à un caviste qui pliait boutique, j’ai commencé à vendre des bouteilles puis j’ai acquis ce local et j’en ai parlé à Céline ».

Céline, de son côté, a d’abord travaillé avec Alain Bosc, caviste des Plaisirs de la Table à Nîmes. Elle a ensuite ouvert un bar à bières avec une petite sélection de vins : « on souhaitait des vins un peu pointus. Comme il y en avait peu sur la carte, je veillais à ce qu’ils soient de bonne qualité. »

Elle réalise que les vins bios et nature lui plaisent davantage que les autres. « Au-delà de la démarche des vignerons, c’est gustativement que j’ai pris une claque avec ces vins-là. Eric Pfifferling, Ganevat… Ce sont des vignerons qui m’ont marqué ».

C’est pourquoi, dès le début, Flacons se veut une cave originale : « On cherchait à proposer une niche, avec une belle sélection de bières et une cave. Ici on ne trouve pas de Ruinart, car en fait le client Ruinart ne nous intéresse pas vraiment. On choisit ce qui nous plaît, pas nécessairement ce qui se vend. Et je suis fière de dire qu’ici il n’y a que des vins qu’on aime ».

Un parti pris osé mais payant puisqu’il leur permet d’avoir une clientèle de connaisseurs. Quand je les interroge sur leur association, elle semble couler de source. Chacun trouve sa place naturellement et la confiance est totale : « nous sommes très différents de caractère, d’attitude et nous avons des goûts différents donc deux clientèles distinctes. On se fait confiance mutuellement. »

Simon et Céline ne manquent pas de projets. Comme beaucoup de cavistes, ils ont comme objectif de digitaliser la cave et ils ont acquis la veille du premier confinement un vélo électrique flambant neuf pour proposer des livraisons « vertes ».
Une démarche cohérente pour Flacons, terreau d’une belle aventure destinée à s’inscrire dans le paysage nîmois.

Les coups de cœur de Céline et Simon

Votre région de prédilection ?

Céline : « Le Jura c’est vraiment ma région de prédilection, c’est équilibré, fin, original. Ça déroute. »

Simon : « Plus jeune, j’aimais les vins puissants et tanniques. En vieillissant mes goûts évoluent et aujourd’hui je recherche davantage la buvabilité, le fruit. J’aime par exemple les vins du Beaujolais.

Un vigneron coup de cœur ?

Céline : « Les vins du domaine Pierre & l’étoile situé à Saint-Chinian. C’est bon et bon marché. »

Simon : Domaine Ledogar, tout particulièrement la cuvée Les Brunelles millésime 2016.

Un vin pour tous les jours ?

« Un vin de Loire blanc, c’est frais, pas fatiguant, et il y a encore de superbes rapport qualité prix. »

La recette de tata

Elle est ma tante et ma marraine, nous avons en commun un sacré tempérament, le goût des belles tablées familiales et le même héritage culinaire. J’ajoute qu’elle est aussi la maman de deux garçons ! Nous avons noué depuis ma plus tendre enfance une relation forte et Marie-Pierre occupe aujourd’hui une place toute particulière dans ma vie, entre une deuxième maman et une grande sœur.

Bon sang ne saurait mentir : les lasagnes sont sa grande spécialité, cousines des fameux raviolis de pépé, recette de mon grand-père maternel et ma madeleine de Proust. Ce plat « réconfort » qu’elle me cuisine très souvent est lui aussi chargé de souvenirs.

Lors de notre dernier déjeuner j’ai donc mis la main à la pâte (à lasagne) et je vous livre la recette. Attention, comme elle le dit elle-même en occitan, les proportions, sont a vista de naz !

Ingrédients pour 6 à 8 personnes

  • 300 grammes environ d’épinards (que vous pouvez remplacer par des blettes)
  • 1200 grammes de farce : 2/3 de farce de porc et 1/3 de bœuf   
  • 2 œufs
  • 500 grammes de ricotta
  • 100 grammes de grana padano râpé (pas forcément besoin d’un fromage d’exception, il sert surtout ici à apporter du liant)
  • 120 grammes de gruyère râpé
  • un oignon ciselé
  • sel,  poivre, thym
  • 1 paquet de feuilles de pâtes de lasagnes fraiches
  1. Faites revenir l’oignon.
  2. Mélangez au reste des ingrédients.
  3. Dans un plat, alternez une couche de pâtes et une couche de farce.
  4. Recouvrez le tout avec une couche de gruyère râpé.
  5. Faites cuire au four à 180 °C pendant 30 à 40 minutes.

Que boit-on avec ce plat ?

Restons dans le Languedoc avec la cuvée Lo Sang del Païs en appellation Marcillac du domaine du Cros. Ce 100% Fer Servadou est cultivé dans le vallon de Marcillac où les sols rouge brique chargés en oxyde de fer qu’on appelle rougier apportent aux vins un côté minéral. Ce rouge léger accompagnera à merveille la viande mais aussi le fromage très présent dans la recette. Un vin franc, sans démonstration de puissance, aux tannins fins, aux notes de cassis et de réglisse qui fera honneur aux lasagnes sans les « écraser ».

Alexis Soulas du Fief Noir

1) Ton premier souvenir lié au vin ?

Adolescent, des vacances dans le Luberon chez des amis qui possédaient un domaine viticole. Dégustation à la cuve, odeur de cave, premier verre de vin blanc.

2) Ta plus grande émotion ?

Difficile de les hiérarchiser mais j’ai un très joli souvenir en Roumanie, perdu dans un petit village sous un soleil de plomb, où j’ai passé une soirée à boire de la Feteasca Naegra, le Gamay roumain, pour finir par dormir dans un foudre aménagé.

3) Un millésime marquant ?

2018 en Anjou : une récolte miraculeuse.

4) Ta (tes) région (s) de prédilection ?

Le Rhône Nord.

5) Ton cépage préféré ?

La Syrah pour les rouges et le Chenin pour les blancs.

6) Que trouve t-on dans ta cave ?

Pas mal de Bandol rouge, de jolis Bordeaux et des Saint-Joseph. Les blancs ne restent pas longtemps…

7) Une bouteille pour un repas en amoureux ?

Un Brunello di Montalcino.

8) Un bouteille à ouvrir entre amis ?

Un Muscadet.

9) Une bouteille lors d’un repas de Noël ?

Un vin jaune du Jura.

10) Un vigneron encore peu connu à recommander ?

Simon Ribert en Madiran.

Pour 2021, 21 vins à moins de 21€

En 2021, je vous souhaite de boire bien et de boire bon. Et ça ne signifie pas forcément boire cher. Pour preuve, cette sélection éclectique de  21 vins à moins de 21 euros (prix caviste !). Et comme il m’aurait été impossible de choisir parmi la gamme de Vins d’Avenir, j’ai demandé à quatre cavistes talentueux et passionnés de partager avec nous leurs coups de cœur.

Toutes ces bouteilles sont proposées dans leur cave et elles peuvent vous être expédiées si vous n’êtes pas dans la région.

La sélection de Mathieu Shillinger de L’Arbre à Vins (Vaison la Romaine)

  1. La cuvée Hautes-Bassières 2017 du Château de Vauxun vin de Moselle 100% Pinot noir, 17,40€.

«  C’est un domaine en biodynamie, c’est  très frais, moderne, « fastoche » à boire. »

  1. Prima Dona 2019 du Prieuré La Chaume, un vin de Vendée, assemblage de Pinot noir, de Chardonnay et d’une faible proportion de Chenin, 19,50€.

« C’est un vin qui sort de sentiers battus. Situé au cœur de la vallée du Rhône, j’ai une clientèle de vignerons pas facile à surprendre. Et c’est le cas de ce vin. A l’aveugle, c’est très déroutant. »

  1. Le Clot 2017 du domaine du Clot de l’Oum, Côtes du Roussillon villages, une sélection parcellaire de Syrah, 19€.

«  Super digeste ! Dense et long. »

  1. La Louronne 2018 du Château Simian, Massif d’Uchaux 100% Grenache gris, 17 €.

« Un 100% Grenache gris c’est atypique, cela apporte une expression plus fraiche que ce que l’on peut trouver parfois dans la vallée du Rhône, équilibré avec un côté oxydatif. C’est un super vin de table. Il s’accorde merveilleusement bien avec des fromages de caractères comme un vieux Picodon ou un vieux comté. »

  1. Xinomavro 2019, jeunes vignes du domaine Thymiopoulos, Naoussa (Grèce), 17,50€.

« C’est le nom du cépage. C’est un vin dans un style très bourguignon avec de jolis tanins poudrés. Et c’est atypique. »

La sélection d’Illan Hubner de La mère Minard (Saint Quentin la Poterie)

  1. Baltazar  2019 du domaine LBV IGP Cévennes, 100% Grenache noir, 18€.

« C’est un domaine que j’adore, Julie Le Breton et Christophe Vial sont des amis. J’ai pu assister aux vendanges et au travail en cave, ils sont d’une très grande exigence. Ils travaillent avec une vieille presse en bois des années 50, les raisins sont égrappés puis retriés sur le tapis roulant. Il en résulte un Grenache délicieux, rond et équilibré. »

  1. La Grande Rando, Terres du Gaugalin, assemblage de Grenache (65%), de Carignan (15%), de Cinsault (10%) et de Clairette (10%), 17€.

« Ce petit coin de paradis mérite toute notre attention. La majorité des vignes a une cinquantaine d’années et le vignoble est en conversion biologique. Ce vin possède un côté confiture compotée que j’adore. »

  1. « Carignan Radical », Domaine Pèira Levada Faugères 100% Carignan, 20€.

« J’adore le Carignan ! C’est un cépage rond avec une belle matière, velouté, avec un nez bien fruité ! ».

  1. La cuvée Épouse-moi ! du domaine Le Pas de la Dame, Vin de France 100% Chardonnay, 10€.

«  C’est une superbe découverte. Pour moi c’est un Chablis à 10 balles ! On est sur la même palette aromatique qu’un Chablis mais beaucoup moins cher. C’est fou»

  1. Gewurztraminer 2016 du domaine de l’Envol, 13€.

« C’est un très joli Gewurztraminer pas trop sucré. Avec cette note de muguet que je trouve très délicate. »

La sélection de Benoit Locatelli de la cave Hardiesse (Nîmes)

  1. Bastingage 2017 du Clos de l’Élu, 100% Chenin, 20€.

«  C’est un putain de Chenin ! Un vrai vin de repas. C’est chaud, drainant. Classe »

  1. Bourgogne Aligoté du domaine Sylvain Pataille, 100% Aligoté, 15€.

«  C’est un superbe rapport qualité prix ».

  1. Renverse moi du Château Valflaunès, 100% Carignan, 9€.

« J’adore la démarche, c’est un vigneron en Pic Saint Loup qui aurait pu produire cette cuvée en AOP mais il aurait fallu produire un vin plus riche, « bodybuildé ». Il préfère écouter son terroir et produire un vin léger, friand. Je trouve la démarche courageuse et saine. »

  1. Ornicar 2019 du domaine Jean-Baptiste Sénat, appellation Minervois, assemblage de Grenache (80%), de Carignan (10%) et de Mourvèdre (10%), 18€.

« J’ai choisi Ornicar mais j’aurai pu mettre toute la gamme en 2019 tant le millésime est abouti. J’ai choisi Ornicar car c’est la saison de la truffe et c’est un accord magique avec ce vin. »

  1. Souvenir  2019 du domaine Si le Vin, IGP Colline rhodanienne, 100% Gamay, 11€.

« Un vin solaire, gourmande. Facile. »

  1. Picpoul de Pinet 2019 du domaine du Petit Roubié, 100% Picpoul, 11€.

« C’est un vin évidemment idéal avec les huitres. Il est iodé mais pas seulement. Il y a également un peu de matière, de gras. Ça fonctionne avec un repas complet de poisson. »

La sélection de Marie Marquis de La Part des Anges (Nîmes)

  1. Eolienne du Mas d’Espanet, assemblage de Picpoul, de Grenache et de Viognier, 13€.

« C’est un vin plein de fraicheur, le domaine est cultivé en biodynamie. »

  1. Soufre qui peut du Mas du Chêne, 100% Syrah, 13€.

«  C’est un vin sans soufre, à carafer une bonne demi-heure, mais c’est hyper gourmand, facile à boire ! »

  1. Marsanne 2019 du domaine du Petit Roubié, 100% Marsanne, 9€.

« Incroyable rapport qualité prix. Un blanc idéal pour l’apéritif. C’est fruité, c’est facile. »

  1. Astralab 2015 du domaine Le Chêne bleu, AOP Ventoux, assemblage Grenache et Syrah, 20€.

« C’est un vin aux tannins soyeux. Élégant plus que puissant. Vinifié par une femme ce qui ne gâche rien. »

  1. Lema 2017 du domaine de Roquemale, Grès de Montpellier, assemblage de Syrah, Grenache et Mourvèdre, 17€

« Des arômes de prunes, de pruneau. Un vin où apparaissent des arômes de vieillissement. Très atypique. »

Ramène ta Fraiz (et ton fromage)

Après une carrière d’acheteuse dans l’automobile en Isère, poussée par un fort désir d’indépendance, Céline Bros décide de retrouver son Sud natal et de créer son entreprise.

Sensibilisé au goût des bonnes choses depuis une enfance passée à la campagne, elle fait le constat que, mère de famille, elle se retrouve souvent tiraillée entre l’envie de manger sainement et la facilité des drives de la grande distribution. Elle tient là le concept de Ramène ta Faiz : un drive de produits de qualité issus des circuits court ! La plateforme en ligne réunit des producteurs engagés, « pas forcément du bio ou du local mais, souvent, cela va de pair » reconnaît la fondatrice.

Depuis, Céline court la France à la recherche de producteurs triés sur le volet, choisis pour leurs bonnes pratiques mais aussi et surtout le goût de leurs productions. C’est avec passion qu’elle me parle des huitres de Camargue ou des poulets élevés en plein air dans les Costières de Nîmes. Mais aujourd’hui notre discussion porte sur les fromages et des différents accords possible avec le vin.

Quels sont les critères selon toi pour un bon fromage ?

Je privilégie évidemment les fromages au lait cru et, lorsque c’est possible, les fromages fermiers, c’est-à-dire issus du lait d’un seul troupeau. Ce n’est pas toujours le cas car il faut 850 litres de lait pour réaliser une meule. Je fais alors appel à de toutes petites coopératives laitières comme c’est le cas de mon Beaufort ou de mon Comté.

Le deuxième critère indispensable, c’est le goût. Je cherche des fromages affinés avec des saveurs prononcées, des fromages de dégustation.

Quel est ton fromage préféré ?

Le fromage de tous les jours, c’est le Comté. Celui des jours de fêtes, c’est le Beaufort. Fabriqué dans les hautes montagnes de Savoie, il s’agit d’un fromage à pâte pressée cuite, au lait cru et entier qui provient de deux races bovines, les Tarines et les Abondances. Le goût du Beaufort change avec les saisons et l’alimentation des vaches. Le Beaufort fabriqué de novembre à mai, lorsque les vaches sont en vallée et nourries essentiellement de foin, est très doux. Durant la période estivale, lorsque les bêtes peuplent les alpages et mangent de l’herbe pâturée, son goût est plus fruité et plus prononcé.

J’aime beaucoup aussi le Reblochon qui est le fromage de la Savoie par excellence. Idéal en tartiflette, il se déguste également cru, simple question de goût. Celui vendu par Ramène ta Faiz est au lait cru et fermier.

Accord vin et Comté

Tout dépend l’affinage du Comté mais il faut un vin qui offre du volume en bouche. On peut naturellement proposer un accord de région avec un vin du Jura.

Un Comté affiné requiert un blanc avec de la texture et une belle persistance en bouche. Je pense aux Châteauneuf blancs et tout particulièrement la cuvée Le Traversier du Château Simian.

Accords vin et Beaufort

Fromage fruité et fin, il se marie bien avec un vin de Savoir bien sûr mais on peut tenter un accord plus original comme un Languedoc blancaromatique et ample, par exemple la cuvée Alvéoline du domaine Rouanet Moncélèbre.

Accords vin et Reblochon

Le Reblochon peut supporter un vin rouge mais, attention, peu tannique ! La cuvée Souvenirs à base de Gamay de Sylvain Badel pourrait se marier à merveille avec ce fromage ou encore la cuvée Irréductible rouge du Clos Roussely à base de Pineau d’Aunis.

Quel est le plateau de fromage idéal selon toi ?

C’est un plateau varié, où l’on retrouve des fromages avec des laits, des régions et des textures différents. Idéalement, il y a une progression dans la dégustation. Il faut commencer par des fromages crémeux, du Saint Marcelin ou du Saint Félicien par exemple. Ensuite une tomme de chèvre affinée ou pas, un brie de Meaux, éventuellement truffé mais seulement si c’est bien fait. Il faut aussi des pâtes cuites ou des pâtes pressées comme du Beaufort et du Comté et une pâte persillée, un bleu de Gex ou un Roquefort. L’avantage du Bleu de Gex c’est qu’il est parfumé mais ne pique pas.

Accord vin et Brie de Meaux

Avec un brie de Meaux, un champagne ou à défaut une méthode traditionnelle peut être un accord redoutable. La bulle permet de « dégraisser » la bouche et évite au palais de fatiguer tandis que les notes de levure du champagne accompagnent le brie avec beaucoup d’élégance. La cuvée Brut formula du domaine Rieflé pourrait sans doute soutenir un tel fromage.

Accord vin et bleu de Gex

Les accords les plus réussis avec les bleus sont sans conteste les vins liquoreux ou du moins les vins contenant de la sucrosité. Oscillant entre douceur et salinité, il faut des vins doucereux pour répondre à ces fromages.En outre, il existe un parallèle entre les moisissures de ces fromages obtenues grâce à l’humidité des caves et la pourriture dite « noble » qui se développe sur les raisins.

Avec un bleu de Gex, je suggère un Coteaux-du-Layon comme par exemple La cuvée Nouvelle confidence du Fief Noir.

L’interview vineuse du père Noël

Cher père Noël, merci de prendre un peu de temps pour nous parler de votre rapport au vin…
C’est normal, je suis un passionné, les bons vins sont indissociables de la nuit de Noël. Évidemment, ils figurent rarement sur les listes de cadeaux des enfants mais souvent sur celles des adultes.

Vous voyagez dans le monde entier, pouvez-vous nous donner quelques tendances de consommation ?

On produit du vin partout dans le monde et il existe de bons vins dans de nombreux pays.

Les vins italiens sont complexes et fabuleux mais il faut reconnaître que la France conjugue des savoir-faire et une diversité exceptionnels.

Quels vins ont vos faveurs ?

vins-avenir.fr/loire/#fief-noir(ouvre un nouvel onglet)

Avec la mère Noël, nous vivons au Pôle Nord où nous mangeons beaucoup de poissons. Les vins blancs ont donc ma préférence. Je les aime gras et ronds. J’ai un faible pour les Meursault mais j’ai récemment découvert les vins blancs de la vallée du Rhône qui ont beaucoup de caractère également, de la structure et de la matière. J’ai dégusté la cuvée la Louronne du Château Simian. Ce fut un vrai coup de cœur.
La mère Noël, elle, sait apprécier un petit coup de rouge, notamment ceux du Languedoc, la cuvée Alvéoline du domaine Rouanet Moncélèbre compte parmi ses favoris. Elle aime beaucoup aussi les vins de Loire, tout particulièrement le Cabernet franc, gourmand et charmeur, dans la cuvée Somnambule du Fief Noir.

Nous sommes également amateurs de spiritueux. Le soir, au coin du feu, en lisant les lettres des enfants nous dégustons souvent un Cognac Ulysse de la maison Drouet aux notes de vanille et de café.

Quant aux lutins, ces p’tits jeunes, ils aiment la bière. En ce moment ils se régalent de la bière bio Agora brassée dans le Ventoux.

Un accord mets et vins réussi pour les fêtes à nous conseiller ?

Au Pôle Nord nous pêchons beaucoup de saumon et nous le cuisinons en gravelax. Le poisson est frotté avec du sel et du sucre et laissé à mariner pendant plusieurs jours. Il est possible d’ajouter de de l’aneth et d’arroser avec un peu de gin. Celui de Cœur de cuivre est parfait, frais et légèrement poivré. Pour accompagner ce plat, il faut un vin tendu mais avec de la matière. Le Riesling Bihl du domaine Rieflé est idéal : puissant avec une belle salinité, minéral et de belles notes exotiques.


Que répondez-vous à vos détracteurs qui affirment que vous n’existez pas ?

Et bien, ce n’est pas donné à tout le monde d’avoir la foi. C’est un privilège. Moi j’avance que c’est plutôt le monde dans lequel nous vivons actuellement qui est irréel, pas moi !

Alors il vaut mieux parfois croire à l’incroyable et oublier la réalité.

Je dois vous laisser, j’ai du pain sur la planche.

Réjane Pouzoulas du domaine Wilfried

  1. Ton premier souvenir lié au vin ?

L’odeur de la cave, tous les soirs en rentrant de l’école. J’avais pour habitude d’aller dire bonjour à mon grand-père et cette odeur ne m’a jamais quittée. Ma fille m’a récemment dit la même chose…

  1. Ta plus grande émotion ?

J’ai eu plusieurs grandes émotions de dégustation mais je retiendrai la cuvée Pur sang de Didier Dagueneau en Pouilly Fumé et le Clos des Lambray en Morey-Saint-Denis. Deux très grands vins ! Pour des cuvées plus abordables, je partirai sur un Susucaru Rosso de Frank Cornelissen en Sicile ou un Vin de copains 2013 du domaine.

  1. Un millésime marquant ?

Chaque millésime a son importance mais un millésime qui m’a marqué au domaine et sur l’appellation Rasteau est 2012, une année marquée par la longueur des arômes et la finesse. Le début d’une réflexion : on peut faire des vins frais et fins dans le sud !

  1. Ta (tes) région(s) de prédilection ?

Toutes ! Impossible de choisir même si ma région de cœur reste bien sûr la vallée du Rhône. Je suis très admirative du travail des vigneron.ne.se de Bourgogne, du Jura, d’Alsace, de la Champagne… Quand je te disais que je ne pouvais pas en choisir une !

  1. Ton (tes) cépage(s) préféré(s) ?

J’aime beaucoup le Grenache lorsqu’il pinote pour son côté floral, le Pinot noir et le Poulsard. En blanc je partirai sur le Chardonnay et le Chenin.

  1. Que trouve-t-on dans ta cave ?

Dans ma cave personnelle, j’ai pas mal de vins de Loire (Jasnières,  Anjou, Saumur), des vins du Jura, quelques bourgognes et des champagnes. Et bien sûr des vieux millésimes du domaine.

  1. Une bouteille pour un repas en amoureux ?

Un coteaux champenois rouge.

  1. Une bouteille à ouvrir entre amis ?

Une seule bouteille ? À l’apéro je partirai sur un crément d’Alsace de chez Albert Boxler et la cuvée L’Uva Arbosiana, un Poulsard en appellation Arbois du domaine de la Tournelle.

  1. Une bouteille lors d’un repas de Noël ?

Un bourgogne avec un Gevrey Chambertin (c’est Noël, quand même !). Mais aussi un vieux millésime de Rasteau du domaine, c’est une tradition !

  1. Un vin à ouvrir dans dix ans ?

Un champagne. J’adorerais me constituer une cave avec de vieux champagnes ! Les arômes un peu oxydatifs et les champagnes vineux me plaisent beaucoup.

Le Grenache : une variété qui fait rimer puissance avec élégance

Le Grenache noir est originaire d’Espagne et compte aujourd’hui parmi les cépages rouges les plus plantés au monde. En France, il règne en maître dans le sud de la vallée du Rhône et il occupe une belle place en Provence, en Corse et dans le Languedoc.

C’est un cépage extraordinaire qui peut être vinifié seul comme en assemblage, en rouge ou en rosé. Il peut produire des vins de plaisir mais également de grands vins de garde. À Gigondas notamment, le Grenache apporte aux assemblages une grande aptitude au vieillissement. Gorgé de sucre à maturité, il est le cépage de référence pour l’élaboration des vins doux naturels du Roussillon. Pour Benoit Gil du domaine Monplézy, la variété dispose d’un autre atout indéniable du point de vue économique : « Même avec des rendements élevés, le Grenache peut produire des vins exceptionnels. Ce n’est pas le cas du Mourvèdre ou du Carignan ».

La variété est par contre délicate à la vigne. Thibault Kerhoas du domaine Delacroix Kerhoas, dont le Grenache représente environ 60% de l’encépagement, me le confirme : « C’est effectivement un cépage fragile, la peau est fine. En 2017, à cause de la coulure [résultat d’une mauvaise fécondation de la fleur de la vigne entraînant sa chute], nous avons perdu la moitié de la récolte ».

Toutefois il résiste particulièrement bien à la chaleur. Pour Benoit Gil c’est le cépage le plus prometteur du sud de la France : « si nous trouvons des solutions pour lutter contre le mildiou [une maladie cryptogamique, c’est-à-dire causée par un champignon] grâce à la recherche, il me semble que le grenache est idéal pour notre région. » Pour preuve la cuvée Gabrielle, fleuron du domaine, est un 100% Grenache, « issue d’une parcelle qui affleure la roche mère, aux rendements faibles et aux quantités limitées, mais qui produit un vin avec beaucoup d’élégance ».

Même constat de Mathieu Rabin du Château Juvenal, où le Grenache est également vinifié en mono-cépage dans la superbe cuvée Perséide : « Nous cherchons avec cette cuvée à mettre en avant l’essence de ce cépage. C’est une parcelle de vieilles vignes en coteaux orientée plein sud. Nous sommes extrêmement vigilants à la maturité des raisins. Parfois lors de la récolte ils sont légèrement sur mûris et il se dégage de la cuve une odeur caramélisée. Lors de la vinification nous faisons de longue cuvaison mais pas d’élevage en barrique pour ne pas maquiller le raisin ». Il en résulte une cuvée aérienne aux arômes de fruits rouges d’une grande délicatesse.

Dans le verre, tous s’accordent à dire que le Grenache donne des vins capiteux, peu acides, aux arômes de fruits rouges comme la framboise et soulignés par des notes d’épices douces comme la cannelle.

Reconnaissable à son port dressé et ses rameaux vigoureux, le grenache se prête particulièrement bien à la taille en gobelet comme c’est le cas à Châteauneuf-du-Pape (au domaine de la Porte rouge par exemple), cru célèbre dans le monde entier auquel il est souvent associé. Si les galets roulés sont la marque de fabrique de l’appellation, il existe un autre type de sol où le Grenache fait des merveilles : le terroir sablonneux du Château Rayas. L’expression du Grenache de ce domaine mythique est gravée dans ma mémoire comme l’une de mes grandes émotions de dégustation. Lorsque je travaillais au Château de Montfrin, le propriétaire Jean-René de Fleurieu nous a invité à déjeuner aux Vins de Nos Pères. Nous dégustions à l’aveugle les bouteilles qu’il avait choisies avec l’audace et la générosité qui le caractérisent (et la complicité d’Arnault Pringalle, le maître des lieux que nous avons interviewé). Après la première gorgée, un silence religieux s’est installé. Ovni époustouflant de finesse, j’ai d’abord cru à un Bourgogne. Mais on sentait une puissance comme domptée. C’était celle du Grenache. Je n’oublierai jamais cette émotion, décuplée une fois qu’il ôta la chaussette de la bouteille.

Pour des vins bien élevés

La plupart des bouteilles qui sont bues en France aujourd’hui sont débouchées peu de temps après avoir été achetées. Le consommateur de vin du XXIe est pressé et cette tendance ne devrait pas s’inverser à l’avenir puisque la génération Z, celle des moins de 25 ans, semble bouder les vins dits de garde. C’est en tous cas ce que j’ai pu constater en tant que formatrice.

Il est vrai que les urbains, majoritaires, n’ont souvent ni la place ni le lieu adéquat pour conserver des flacons plusieurs années. Il faut également admettre que les restaurants sont de plus en plus frileux à proposer des millésimes anciens à leur carte. Mais c’est aussi, il me semble, une affaire de goût. D’un goût qui se perd et dont j’ai la nostalgie.

Comprenez-moi bien : il faut de tout pour faire un monde et le mondo vino ne déroge pas à la règle. Je suis la première à succomber au charme des vins vifs, frais et légers, des vins accessibles qui offrent un plaisir immédiat. Mais je déplore que les vins complexes, ceux qui requièrent de la patience, soient oubliés. Pourquoi se priver de la diversité des styles de vins qui sont produits par des terroirs et des vigneron-ne-s tous différent-e-s les uns des autres ? La dive bouteille offre une infinité de choix en fonction du lieu, du moment, des convives, de l’humeur ou du plat. Si j’apprécie la « buvabilité » d’un rouge glouglou à l’apéro avec des amis, à l’inverse, le soir du réveillon de Noël, j’ai envie d’un nectar qui a traversé le temps, qui me racontera une histoire longue et complexe, dans lequel les arômes de fruits côtoieront ceux des sous-bois, de la truffe ou du cuir.

Ne passons pas à côté de la magie du vin, qui se niche dans le temps long. Une fois le jus de raisin devenu vin, commence son élevage, phase qui lui permet de se stabiliser, de s’intégrer, de se complexifier. Comme les enfants, certains vins ont besoin de plus de temps pour se révéler. Christian Chabirand, vigneron du Prieuré la Chaume, les appelle très joliment des vins de mémoire : « notre passion est dictée par une exigence de vérité, celle du temps qui permet à un vin tout au long de son élevage, d’exprimer sa minéralité, libérer son potentiel aromatique et affiner sa matière. Nous élaborons des vins qui sont l’empreinte d’un terroir, d’un climat et des êtres qui les accompagnent : ce sont des vins de mémoire. » Ces vins-là ne peuvent être dupliqués.

Étape et non finalité, l’élevage prépare les vins à la garde. Plus il est long, plus il faudra patienter avant de déboucher la bouteille, décision difficile puisque le vin, contrairement aux spiritueux, continue à évoluer dans son contenant de verre. Certains crus résistent si bien au temps qu’ils peuvent se transmettre de génération en génération. Luxe que n’offre aucun autre produit alimentaire à ma connaissance.

Un bon vigneron élabore des vins accessibles avec un juste rapport budget / plaisir, là où un grand vigneron conçoit — quand le terroir et le millésime le permettent —des cuvées d’exception, ajustant en conséquence les vendanges, les macérations et l’élevage. Intuitif et audacieux, il fait le pari, parfois risqué, qu’elles sauront rester dans les mémoires. L’objectif de ces deux types de vin n’est tout simplement pas le même. Les noms des gammes du domaine Monplézy sont éloquents : les vins gourmands et digestes se nomment « Plaisirs », là où les vins de garde et de fête sont appelés « Emoción ».

Alors que la performance, le jeunisme, l’immédiateté et la surconsommation sont aujourd’hui survalorisés, ne calquons pas les dérives de notre société sur notre rapport au vin, vecteur d’émotion si noble, si précieux et si délicat.