Chaque année, fin janvier, a lieu à Montpellier Millésime Bio, la grande messe des vins bio. Il s’agit d’un salon professionnel qui met en contact des centaines de vignerons, de France et d’ailleurs, tous certifiés en agriculture biologique, avec des importateurs, des agents, des grossistes, des cavistes ou encore des sommeliers. J’y ai d’abord participé en tant qu’exposante et je m’y rends maintenant comme visiteuse. C’est l’occasion de découvrir des domaines qui pourraient intégrer la sélection et de rencontrer tous les producteurs avec qui je travaille déjà. Nous échangeons sur l’année écoulée, je goûte les vins du dernier millésime et les nouveautés quand il en existe. Et cette année les vignerons de la sélection Vins d’Avenir ont été créatifs !
Paul Riéflé, du domaine éponyme, nous a présenté son crémant Brut Alpha, un deuxième pétillant dans la gamme. Les bouteilles ont été dégorgées en 2018 après quatre ans de vieillissement sur lattes. L’assemblage, la méthode de vinification comme l’esthétique de la bouteille empruntent aux codes du Champagne (pour connaître la différence entre les types de bulles, je vous renvoie à l’article de Léa Desportes). La bouche est ample, assez vineuse.
Autre nouveauté : un vin orange, le Sacré Loustic, qui porte bien nom. Les baies de très jeunes vignes de Gewurztraminer ont été laissées macérées pendant trois semaines. Ce contact prolongé entre la pellicule et le moût de raisins, habituellement évité pour la vinification en blanc, confère aux jus de la couleur, des arômes et de la matière. Sacré Loustic, vin nature non filtré (là encore, allez lire les explications de Léa), offre un nez très atypique de clou de girofle, de poivre, de cumin. Voici un vin qui nous fait voyager, ses notes de curry et de gingembre confit appellent à des accords lointains, pourquoi pas du côté de l’Inde.
Au domaine Wilfried, ce sont également deux nouvelles cuvées qui ont vu le jour. Les paradis perdus, c’est une parcelle rayée des cartes lorsque l’appellation Cairanne est née en 2016. Décision injuste et incompréhensible selon les vignerons Réjane et Wilfried Pouzoulas, qui ont décidé de vinifier à part ces vieilles vignes de Grenache plantées sur un sol argilo-calcaire. Le résultat est une cuvée parcellaire tout en légèreté et en finesse. Le vin s’ouvre sur des notes de pivoine puis déroule des notes de baies, de groseille et d’épices. 2018 est déjà en rupture mais le paradis mérite sans doute un peu de patience … La sœur et le frère, qui ne sont pas oisifs,ont également élaboré un rosé en Vin de France, Le courage des oiseaux.
Direction le Languedoc et le domaine Rouanet Moncélèbre. Audrey Rouanet, agacée de devoir sacrifier ces jolis Cinsault à une mode qui réclame des rosés de plus en plus pales et insipides, a décidé de garder ces raisins pour produire un monocépage rouge en vin de Pays. On chante à nouveau avec ce rafraichissant Se Canta 100% Cinsault et on crie « vivement l’été ! ».
Il n’a pas pu venir au salon mais il n’a pas chômé non plus, Sylvain Badel. Si le vin, une des références de la sélection avec ses Saint-Joseph rouges, propose cette année une cuvée de l’appellation nord-rhodanienne … en blanc ! Les volumes sont ultra confidentiels et il n’y en aura pas pour tout le monde. Je n’ai pas encore gouté mais il y a fort à parier que nous ne serons pas déçus. Je vous en parle dès que ce sera fait.
Enfin, le Château Cohola se lance avec brio dans l’aventure des vins sans soufre. Et pour satisfaire tout le monde, ils ont élaboré un rouge et un blanc. J’ai été particulièrement impressionnée par leur Sablet blanc, produire des vins nature dans cette couleur étant un exercice périlleux. Le talent de vinificateur de Jérôme Busato a fait naître une cuvée aux arômes complexes de brioche et de safran qui offre une très belle longueur en bouche. En rouge, la micro cuvée 100% Syrah a été vinifiée en amphores. A l’ouverture les marqueurs du cépage sont bien présents : des notes animales, d’abord, puis des arômes de violette et de poivre blanc.