Le Chenin est un cépage blanc qui suscite beaucoup d’admiration de la part de celles et ceux qui le produisent et le dégustent.
Variété typique des vins blancs de la Loire, où elle porte aussi le nom de Pineau de la Loire ou de Pineau d’Anjou, elle y produit, selon la teneur en sucre et au bon vouloir des millésimes et des terroirs, des vins secs et vifs, liquoreux ou encore effervescents. Elle développe des arômes de fruits — on cite volontiers la pomme et le coing —, de miel et de noisette. Son acidité soutenue lui confère un excellent potentiel de garde.
En Anjou, au domaine du Fief Noir, Alexis Soulat et Dominique Sirot élaborent des vins blancs exclusivement à partir du Chenin. « C’est un cépage particulièrement bien adapté à nos sols de schiste qui font ressortir sa minéralité. Il possède un énorme potentiel et on peut vraiment le travailler de différentes manières. » Les deux vignerons le déclinent sous toutes ses formes. La cuvée L’échappée est une expression fraîche et variétale du cépage. La cuvée Dis-moi oui est extrêmement charmeuse, avec un tout petit peu de sucres résiduels. En Coteaux du Layon, la cuvée Nouvelles Confidences est un liquoreux touché par le fameux botrytis et, depuis peu, la cuvée Révolution est un vin de macération. Sans oublier les bulles… À chaque fois c’est une réussite car le Chenin conjugue arômes, acidité, amertume et une grande capacité d’élevage et donc de vieillissement. Bref, l’équilibre parfait. Mais c’est surtout la cuvée L’âme de Fond qui, à mon sens (et celui Alexis), reste la plus belle expression du cépage au sein de la gamme. Il s’agit d’une cuvée vinifiée en amphore et en fût de chêne. « Avec le Chardonnay et le Riesling, je le place sur le podium des plus beaux cépages du monde » conclut-il.
Toutefois ne travaille pas le Chenin qui veux. Il s’agit d’un cépage qui peut avoir des difficultés à mûrir, qui peut produire beaucoup et qui donc, si l’on n’est pas vigilant sur la taille, paraître « dilué ». Pourtant le Chenin fait des émules et d’autres régions se sont mises à en planter.
Dans les vignobles du Nouveau Monde, le terroir et des rendements très élevés lui font souvent perdre son élégance. En Afrique du Sud, où c’est la première variété plantée, certains terroirs frais proposent désormais de grands Chenins.
En France, on le retrouve dans le sud-ouest, par exemple à Cahors. Plus original encore : j’ai dégusté récemment un Chenin aveyronnais en compagnie de son auteur, Éric Bousquet, caviste et néo-vigneron au domaine Mousset à Espalion. Le Peyrouty 2018 est de très belle facture, avec une belle tension et une jolie patine. Interrogé sur ce choix, son regard pétille. « Attention, ce Chenin, c’est comme si on ouvrait un Meursault » me prévient-il. « J’ai choisi de planter du Chenin car il est possible qu’il y en ait toujours eu dans l’Aveyron. Notre climat semi-montagneux avec beaucoup d’humidité s’y prête bien. J’aimerais pousser les maturités pour produire un Chenin de belle complexité. Si je peux avoir un peu de botrytis, ce serait le top. »
Dans le sud de la France, certains vignerons s’y risquent aussi, sur les contres-forts des Cévennes notamment. Thibault Kerhoas du domaine Delacroix Kerhoas plante du Chenin l’année prochaine pour chercher « de la fraîcheur ». Le vigneron sait qu’il va devoir être vigilant car « le Chenin craint le mildiou et qu’ici nous en avons beaucoup. » Une aventure que Vins d’Avenir ne manquera pas de suivre…