Chez Agora, la bière artisanale se fait mousser

Alors que depuis des années la consommation de vin décroît, la consommation de bière suit une tendance inverse. En France, en moyenne, une nouvelle brasserie ouvre chaque jour. On comptait 246 brasseurs en France en 2006, 1600 en 2020 et ils seraient plus de 2 000 aujourd’hui ! Bonne nouvelle : ce sont surtout les bières artisanales qui progressent. Pour comprendre ce phénomène, je suis allée interroger Théo Gabriel, gérant et brasseur de la très chouette brasserie Agora.

Du raisin au brassin

Théo a plus ou moins toujours évolué dans le monde de la gastronomie. À 11 ans, il fait une première incursion dans la cuisine de son père restaurateur. Puis, plus tard, lorsque la famille ouvre son restaurant, il intègre l’équipe. « J’étais polyvalent mais j’ai très vite compris que pour assurer la pérennité économique du restaurant et améliorer les marges, il nous fallait une belle carte des vins. J’avais beau lire des bouquins, ce n’était pas suffisant. » Il décide alors d’intégrer en 2015 la formation de sommelier caviste de Suze-la-Rousse. Parallèlement, depuis 2012, Théo brasse chaque année en amateur avec des copains. « C’est comme ça que j’ai appris, en expérimentant, en faisant des erreurs ». Peu à peu, l’idée de monter sa brasserie fait son chemin. Il s’associe avec quatre amis à lui, dont Sébastien Alban et Mathieu Rabin du Château Juvenal. Même si sa part est majoritaire, Théo souhaitait ne pas entreprendre seul. « Avec Mathieu, nous apprécions monter des projets ensemble et je trouve la réflexion plus riche et plus aboutie quand on est plusieurs. Je dois dire également que mes quatre associés sont les meilleurs prescripteurs de la brasserie. Beaucoup de clients sont venus à nous grâce à eux. » La brasserie ouvre à Carpentras en 2019 et c’est un succès. Mérité : les bières brassées par Théo sont aussi belles que bonnes.

Boire sans ivresse

Lorsque je le questionne sur les raisons du développement des brasseries en France, Théo y voit au moins deux raisons. « Pendant des années, les seules bières sur le marché étaient des produits industriels. Comme pour le vin, les consommateurs recherchent des produits artisanaux et locaux. La deuxième explication, c’est qu’aujourd’hui les gens font très attention aux degrés d’alcool — là encore problématique rencontrée dans le vin — et la bière permet de boire sans être ivre.

Quid de la pérennité économique de ces micro-brasseries alors que les marges sont faibles et qu’il faut produire et vendre un certain volume ? « Il y a de la place pour tout le monde mais c’est vrai que le modèle économique pose question et que certaines périclitent. Être cinq est aussi un atout pour cette raison. »

Accords houblonnés

Comment définir une bonne bière ? Une fois encore, Théo fait une passerelle avec le précieux nectar : « comme pour le vin, il faut un équilibre entre l’amertume, la sucrosité, la qualité des bulles et la palette aromatique. »

Les productions de la brasserie Agora méritent de ne pas être cantonnées à l’apéro. Avec la blonde, « la plus consensuelle, conçue pour plaire à toutes et tous, fleurie et équilibrée », Théo conseille un Beaufort ou un Comté. Avec la IPA, nettement plus amère mais qui dévoile aussi de très séduisantes notes exotiques, essayez une salade d’endives pour faire ressortir l’amertume ou bien au contraire casser les codes avec un dessert au miel, un pain d’épices par exemple. La noire, qu’on obtient grâce à un malt torréfié, se marie particulièrement bien avec le gingembre, les pâtes persillés ou encore la cuisine asiatique. Chaque année, la brasserie expérimente de nouvelles bières. La dernière en date est une blonde triple boisée avec beaucoup de caractère. Elle innove aussi sur les formats, toutes les couleurs existent en 75 cl et même en magnum. Les cinq associés ne comptent pas s’arrêter en si bon chemin. Ils ont sorti il y a quelques mois un délicieux gin aux notes citronnées que j’affectionne particulièrement. Si vous souhaitez découvrir toutes leurs créations, la brasserie Agora organise cet été plusieurs soirées avec de la petite restauration. Suivez-les sur Facebook pour être tenu.e informé.e.

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