Deux mille vingt-quatre, est ce qu’on appelle un millésime “compliqué”.
2024 a commencé avec un printemps pluvieux et froid, propice aux maladies, notamment au mildiou (champignon de la vigne). Ce qui complique le travail des vignerons, notamment en bio, où les traitements lessivables doivent être reproduits dès qu’il pleut.
“C’est un petit millésime en quantité, avec beaucoup de mildiou et de la coulure sur les grenaches” m’explique Amélie du Mas Baudin.
Et rien ne s’est arrangé puisque le mois de septembre a aussi apporté son lot de pluie et d’humidité, histoire de compliquer un peu plus les vendanges.
Sans compter les régions comme Cahors, qui ont énormément souffert du gel cette année. Bref, un millésime qui s’annonce tout petit en quantité, mais heureusement plutôt pas mal du tout en qualité !
Quoi qu’il en soit, les vignerons n’avaient pas besoin de cela. Comme toute la filière agricole, la viticulture est en difficulté, c’est la première année que je la ressens autant.
C’est la première fois depuis que j’ai crée Vins d’Avenir que des vignerons m’écrivent pour m’annoncer qu’ils arrêtent leur activité. C’est la première année où autant de cavistes ferment définitivement leurs établissements.
Je n’aime pas être pessimiste, mais je suis inquiète. Depuis les années 70, la consommation de vin en France ne cesse de baisser (127 litres/an/habitant en 1960 pour 40 litres/an/habitant en 2023). Le vin aliment a disparu au détriment du vin plaisir.
Sauf que même le vin plaisir est fustigé . Récemment, un caviste a confié à son médecin qu’il buvait deux verres de vin par jour et s’est vu interdire son petit plaisir bachique. Je ne fais pas l’apologie de l’alcool et je comprends que, pour diverses raisons, les gens fassent attention. Je suis tout de même frappée de voir à quel point le vin est devenu un produit considéré comme dangereux alors que le sucre et le gras ne cessent d’envahir nos assiettes (et nos artères). Je vois fleurir un peu partout des vins sans alcool” qui seraient prétendument une réponse “healthy” . Permettez moi de rappeler que ce sont des produits ultra transformés très riches en sucre.
Le vin est un produit français, produit en France et dont l’ingrédient principal est produit sur le territoire. (Ce n’est pas le cas par exemple de la bière qui doit importer une grande majorité de malt et de houblon). Le vin est une vitrine dans le monde entier et l’un des symboles de l’excellence française. Nous devrions chérir nos vigneronnes et vignerons. La filière viticole soutient activement notre économie (3e secteur d’exportation derrière l’aéronautique et les cosmétiques). Nous sommes nombreux à déplorer la politique actuelle d’un monde globalisé qui ne soutient pas nos agriculteurs français, mais nous avons un pouvoir immense: nous votons avec notre carte bleue.
Bien sûr, le vin ne va pas disparaître demain, mais je n’ai pas envie de voir un monde du vin coupé en deux, où seuls subsistent d’un côté une viticulture quasi industrielle et de l’autre des petits domaines ultra pointus réservés à une élite éclairée et fortunée.