
Oriane Journeau est un électron libre de la cuisine. Elle peut aussi bien remplacer des restaurateurs qui partent en vacances, participer à des résidences ou encore venir cuisiner chez vous à domicile. Je l’ai rencontrée il y a deux ans alors qu’elle officiait avec son associée au Café Pandore à Sainte-Croix, près de Villefranche-de-Rouergue. Pourtant, avant d’aiguiser ses couteaux, Oriane a cherché sa voie. Attirée par le milieu artistique, elle y a évolué pendant dix ans et a participé à différents projets : théâtre, chant, sérigraphie… Elle est devenue salariée d’une association culturelle et s’est retrouvée à devoir faire à manger aux artistes. Elle y a pris goût et s’est rendu compte que sa cuisine plaisait. « J’ai ressenti que cela pouvait être aussi un terrain d’expression artistique pour moi », m’explique-t-elle. Cette sensibilité artistique se retrouve en effet dans sa cuisine. Oriane a un vrai sens de l’esthétique et de l’harmonie. Elle s’est alors inscrite à une formation courte lancée par Thierry Marx, « Cuisine mode d’emploi ». « L’idée pour moi était d’apprendre tous les gestes techniques de base : découper une viande, un poisson, faire des sauces, etc. » Après cette formation, elle a officié dans un restaurant gastronomique à Marseille durant une année. « C’était très formateur, car j’ai eu la chance de passer à tous les postes, mais je me suis rendue compte que c’était épuisant physiquement. Très dur pour le corps. Je travaillais beaucoup et le peu de temps libre qu’il me restait, je le passais à dormir. J’ai compris que ce n’était pas comme ça que je voulais travailler sur le long terme. » Un restaurant était à vendre à Villefranche pour une bouchée de pain ; elle a décidé de sauter le pas. Accompagnée de son compagnon Guillaume, ils créaient le Pied de Poule, un restaurant avec une cuisine du marché fraîche et créative.

L’aventure a duré quatre ans, mais Oriane avait envie d’autre chose, un projet plus collectif et plus rural. Elle monte alors avec Anne Daniellou le Café Pandore, un restaurant cosy et protéiforme où les deux jeunes femmes proposent aussi des événements culturels, des rencontres vigneronnes, des ateliers de couture et un espace friperie. Au bout de deux ans, les deux associées ont repris leurs routes séparément et Oriane s’est installée comme chef itinérante. Lorsque je l’interroge sur cette situation de cheffe sans cuisine, Oriane est lucide sur les prochaines étapes. « Être itinérante , à la fois cheffe en résidence et traiteur, m’oblige à faire beaucoup d’autres choses que de la cuisine. Il faut démarcher, préparer, s’occuper des devis, gérer la logistique. Je me rends compte que cela grignote beaucoup de temps sur la cuisine et ce temps est précieux pour développer ma technique et mon style. Il faut que je trouve à terme une solution pour pouvoir me concentrer sur la cuisine pour affiner et progresser. »

Récemment, elle a remplacé les garçons de la Petite Auberge à Bezonnes ou encore élaboré un repas Chez Armand à Rodez avec des accords mets et vins du domaine Plageoles. Lorsque je lui demande de définir sa cuisine, Oriane donne quelques indices : « C’est une cuisine vivante, inspirée du moment. Très souvent, lorsque j’ai une commande, je donne les grandes lignes et puis, au dernier moment, je change quelques éléments, en fonction du marché, du contexte, de mon humeur. » Ses produits fétiches ? « Les agrumes en général et le citron noir d’Iran en particulier, les herbes fraîches aux senteurs marquées telles que la coriandre ou l’estragon, mais aussi les fleurs, qu’elle n’utilise pas que pour décorer. Comme récemment ce lemon curd parfumé au mimosa. » Curieuse et globe-trotteuse, cette grande voyageuse n’hésite pas à laisser infuser ses voyages dans sa cuisine. « La cuisine méridionale me touche particulièrement, les mezzés, les tapas, j’aime l’idée de petits plats à partager. » Et le vin dans tout ca? Eh bien Oriane est une grande amatrice( j’ai été impressionnée lors de notre toute première dégustation sur ses connaissances en vin) Sensibilisé au monde du vin par sa famille, Oriane a longtemps effectuait les vendanges. Aujourd’hui elle affectionne particulièrement les vins natures mais reste ouverte « Disons que je me suis parfois ennuyée avec la viticulture conventionnelle, j’ai l’impression qu’une bouteille de vin nature me dit plus de choses sur le vignerons et son terroir ».
Alors soyez attentifs, vous trouverez peut-être Oriane derrière les fourneaux d’un autre restaurant, mais le mieux est encore de la suivre sur ses réseaux, car en plus de ses nombreux talents, Oriane a une très jolie plume et partage avec beaucoup de sensibilité ses expériences culinaires.