2024: Un millésime sous haute tension

Deux mille vingt-quatre, est ce qu’on appelle un millésime “compliqué”.
2024 a commencé avec un printemps pluvieux et froid, propice aux maladies, notamment au mildiou (champignon de la vigne). Ce qui complique le travail des vignerons, notamment en bio, où les traitements lessivables doivent être reproduits dès qu’il pleut.
“C’est un petit millésime en quantité, avec beaucoup de mildiou et de la coulure sur les grenaches” m’explique Amélie du Mas Baudin.
Et rien ne s’est arrangé puisque le mois de septembre a aussi apporté son lot de pluie et d’humidité, histoire de compliquer un peu plus les vendanges.
Sans compter les régions comme Cahors, qui ont énormément souffert du gel cette année. Bref, un millésime qui s’annonce tout petit en quantité, mais heureusement plutôt pas mal du tout en qualité !
Quoi qu’il en soit, les vignerons n’avaient pas besoin de cela. Comme toute la filière agricole, la viticulture est en difficulté, c’est la première année que je la ressens autant.

C’est la première fois depuis que j’ai crée Vins d’Avenir que des vignerons m’écrivent pour m’annoncer qu’ils arrêtent leur activité. C’est la première année où autant de cavistes ferment définitivement leurs établissements.
Je n’aime pas être pessimiste, mais je suis inquiète. Depuis les années 70, la consommation de vin en France ne cesse de baisser (127 litres/an/habitant en 1960 pour 40 litres/an/habitant en 2023). Le vin aliment a disparu au détriment du vin plaisir.
Sauf que même le vin plaisir est fustigé . Récemment, un caviste a confié à son médecin qu’il buvait deux verres de vin par jour et s’est vu interdire son petit plaisir bachique. Je ne fais pas l’apologie de l’alcool et je comprends que, pour diverses raisons, les gens fassent attention. Je suis tout de même frappée de voir à quel point le vin est devenu un produit considéré comme dangereux alors que le sucre et le gras ne cessent d’envahir nos assiettes (et nos artères). Je vois fleurir un peu partout des vins sans alcool” qui seraient prétendument une réponse “healthy” . Permettez moi de rappeler que ce sont des produits ultra transformés très riches en sucre.

 Le vin est un produit français, produit en France et dont l’ingrédient principal est produit sur le territoire. (Ce n’est pas le cas par exemple de la bière qui doit importer une grande majorité de malt et de houblon). Le vin est une vitrine dans le monde entier et l’un des symboles de l’excellence française. Nous devrions chérir nos vigneronnes et vignerons. La filière viticole soutient activement notre économie (3e secteur d’exportation derrière l’aéronautique et les cosmétiques). Nous sommes nombreux à déplorer la politique actuelle d’un monde globalisé qui ne soutient pas nos agriculteurs français, mais nous avons un pouvoir immense:  nous votons avec notre carte bleue.
Bien sûr, le vin ne va pas disparaître demain, mais je n’ai pas envie de voir un monde du vin coupé en deux, où seuls subsistent d’un côté une viticulture quasi industrielle et de l’autre des petits domaines ultra pointus réservés à une élite éclairée et fortunée.

L’obélias: fraicheur et excellence

crédit photo l’obelias

Le restaurant Obélias est un nouvel établissement gastronomique qui a ouvert ses portes à Naucelle, au cœur du Ségala, dans l’Aveyron.

J’ai été particulièrement ravie d’apprendre l’existence d’un tel établissement à seulement quinze minutes de chez moi. Rurale, depuis plus de deux ans et épicurienne depuis toujours, les restaurants de cette envergure ne sont pas légion.

Je suis donc partie à la rencontre de l’équipe pour en savoir plus. Je n’ai pas été déçue!

C’est donc un mercredi d’octobre que j’ai fait plus ample connaissance avec Guilhem Fines et Léonie Salles, les propriétaires de l’établissement  respectivement chef de cuisine pour lui et en charge des desserts pour elle,  entourés de Chloé Vignaud leur amie, sommelière et responsable de salle.

Guilhem est originaire de Toulouse, Léonie du Tarn et Chloé d’Auvergne. Tous trois se sont rencontrés en 2021 alors qu’ils officiaient dans un même établissement. Gilhem et Léonie n’avaient pas prévu d’ouvrir si jeune un établissement “ c’est l’opportunité qui nous a décidés, l’établissement était à reprendre, après avoir pas mal bourlingué dans diverses établissements gastronomique de France et d’ailleurs, ils se sont décidés. Ils ont appelé leur amie Chloé sommelière à la rescousse pour se lancer, il y a à peine un an.

J’ai été très touchée par cette équipe. Par leur jeunesse bien sûr, (la doyenne a vingt-six ans), leur fraîcheur et leur détermination à faire du beau et du bon. Léonie m’explique “Nous souhaitions créer une ambiance chaleureuse, nous avons travaillé au Danemark et nous souhaitions porter cette influence nordique en proposant une ambiance chaleureuse, simple, moderne mais chic.” Des matières nobles, du bois, du marbre. Dans l’assiette, les influences nordiques sont là aussi avec une cuisine avec beaucoup de fermentations et qui fait la part belle aux poissons “Ici nous sommes dans une région d’excellence concernant la viande, mais il est plus difficile de bien manger du poisson, c’est l’une des attentes de notre clientèle. J’aime cuisiner le poisson et le sélectionner, je suis moi-même amateur de pêche.” m’explique Guilhem.

C’est aussi leurs liens qui m’ont ému, que j’ai senti profonds. Guilhem et Léonie forment un couple étonnant où leur parcours se répondent en miroir. Lui était un gamin pas scolaire du tout, qui se retrouve dans des situations difficiles au collège, mais depuis toujours intéressé par la cuisine. A l’âge de 11 ans, il organise avec la complicité de sa grand-mère des repas à thème pour sa famille. Très vite ses parents ont la bonne idée de le mettre en contact avec le monde professionnel. Ce sera la révélation.

A l’inverse, Léonie rêve de faire de la pâtisserie mais c’est une élève sérieuse et studieuse que professeurs et parents tentent de dissuader, conscients de la difficulté du milieu. Elle entame alors des études de commerce mais très vite se rend compte qu’elle n’est pas à sa place. Elle intègre une école de cuisine à Toulouse et rencontre Guilhem en apprentissage . 

Tous deux  se complètent et lorsque j’évoque avec eux la réputation hyper exigeante du monde de la cuisine chacun à sa vision . Pour Guilhem cela reste un passage obligé extrêmement formateur, pour Léonie une façon de faire d’un autre temps à ne surtout pas reproduire. Lorsque je leur demande si le sexisme est toujours aussi prégnant dans ce milieu,  même si elles concèdent des progrès, Chloé et Léonie (pourtant pas bien vieilles) ne manquent pas d’anecdotes concrètes (brimades, écarts de salaires etc) . Comme cette fois où  Chloé demanda si c’était monsieur ou madame qui goûtait le vin et où la réponse fut “Monsieur évidemment! Nous sommes en 2024…

Question vin c’est Chloé la spécialiste, qui cherche à bâtir une carte cohérente qui fait la part belle aux petits producteurs et petites pépites.

Quand je lui demande vers quelle région ses goûts la portent, c’est la Vallée du Rhône qui obtient ses faveurs. Notamment pour la cuisine de Guilhem, elle ne tarit pas non plus d’éloges sur les vins Aveyronnais qui ont fait d’énormes progrès ces dernières années. 

Vous l’aurez compris leurs passions, et leurs engagements sont communicatifs et personne ne s’y trompe puisqu’en quelques mois Obélias a déjà obtenu les faveurs du Gault et Millau et du guide Michelin. 

Le Clos Roca: Modernité au cœur du Languedoc

Nicolas Dutour a commencé sa carrière comme œnologue-conseil au cabinet d’œnologie Dubernet. C’est à ce moment-là qu’il fait la connaissance de Monsieur Aleman et de son exploitation Le Clos Roca. Lorsque celui-ci décède brutalement, Nicolas Dutour, conscient des atouts du domaine, décide de sauter le pas, de prendre les choses en main et de devenir vigneron . Aujourd’hui, il porte une vision résolument tournée vers l’avenir. Hélène Queyssalier,  œnologue au domaine et en charge de la  commercialisation, m’explique “Nous sommes très attentifs à avoir une démarche éco-responsable, nous avons un poulailler et un composteur pour la gestion des déchets. Nous utilisons des cartons recyclés et recyclables. Nous travaillons également avec des matières sourcées le plus possible localement

crédit Clos Roca

Par ailleurs, le Clos Roca dispose de nombreux atouts, les parcelles sont toutes autour du domaine, sur des sols profonds de grave, de basalte et de sol argilo-calcaire. De plus, le domaine dispose d’un encépagement varié qui permet l’expression de cuvées mono variétales particulièrement intéressantes. Chacune avec une identité propre, comme l’heureux élu un 100% grenache assez fin ou encore l’Alicante.: “A la base c’est plutôt un cépage teinturier mais c’est une parcelle de vieille vigne assez exceptionnelle, qui donne un vin aux arômes de cacao et de café torréfié.” détaille Hélène.

Les connaissances techniques de Nicolas et Hélène sont précieuses et leur permettent d’expérimenter beaucoup. Ils ont une vision moderne et n’ont pas peur de tenter de nouvelles façons de travailler. Cette année, ils ont par exemple lancé une gamme éphémère, qui donne un aperçu des vins en sortie de vendanges : ils sont encore troubles de la fermentation, légèrement perlants et surtout extrêmement aromatiques !

La plupart des cuvées sont travaillées en levures indigènes mais ce n’est pas automatique. Le domaine travaille aussi avec la bioprotection “Ces levures son-saccharomyces, ensemencées dès l’entrée du raisin en cuve, facilitent le lancement des levures indigènes tout en évitant le développement de l’acétate et d’autres défauts. Vinifier, c’est maîtriser la biologie du vin sans avoir à le faire au travers de produits oenologiques.”  Revendique Hélène.

Pour trouver une réponse adaptée au changement climatique, l’équipe du domaine a également fait le choix de planter aussi des cépages résistants qui supportent mieux la sécheresse. La volonté du domaine c’est de produire des vins avec le moins d’intrants possible, il n’y a par exemple pas d’élevage avec du bois sur les vins rouges “Nous cherchons à faire des vins modernes, avec de la buvabilité “.
Enfin, ce qui m’a le plus épatée lorsque j’ai goûté la première fois les vins du domaine c’est le rapport qualité prix de l’ensemble de la gamme.

Les petites cuvées sortent autour de 7€ ttc et les grandes cuvées entre 10 et 12€ cela reste donc des vins très accessibles, construits avec une conscience éthique et surtout très bons.
La largeur de la gamme permet d’en trouver pour tous les goûts,  j’aime beaucoup la cuvée Guillaume, veloutée et dense assemblage de syrah, grenache et mourvèdre assez typique d’un vin du Languedoc. Les blancs ont aussi beaucoup de personnalité, notamment la cuvée Lucie assemblage de roussanne, marsanne et viognier qui est un joli vin de gastronomie aux notes de pêche et de noisettes.

Famille Morin: Vignerons d’altitude

Les vignobles du Beaujolais connaissent, depuis quelques années, un beau renouveau. Après avoir été longtemps réduits au Beaujolais nouveau, cela fait déjà plusieurs années que les vignerons tentent de donner une nouvelle image à ce vignoble dynamique qui recèle d’incroyables terroirs. Peu à peu, les mentalités évoluent et le Beaujolais parvient à tirer son épingle du jeu.

Le domaine Morin fait partie de ces domaines qui ont su se réinventer. Pauline et Éric Morin, les parents de Théo, exploitent ensemble des vignes pendant dix ans. En 1999, ils rachètent la maison familiale d’Eric, construisent un cuvage et achètent des vignes à Chiroubles, Morgon et Beaujolais Villages. Ils développent la vente de leurs vins en bouteille tout en continuant la vente au négoce.

L’arrivée de leur fils Théo rebat les cartes. Le jeune homme a fait ses armes à Beaune et fort d’un BTS viticulture-oenologie, il entreprend en 2022 de convertir le domaine en agriculture biologique. L’appellation Chiroubles est le cru le plus élevé de la région du Beaujolais. Le domaine compte 7 hectares dont la déclivité peut atteindre 45 %. Dans des zones aussi pentues, le travail n’est pas mécanisable, ce qui exige un travail manuel important. Qu’importe, Théo, épaulé de ses parents, se retrousse les manches.

Théo propose à ses parents de prendre un virage à 180°. Dans les vignes, dans le chai et dans la commercialisation. “Nous avons orienté nos méthodes de fabrication afin de limiter notre impact sur l’environnement : conception d’un éco-packaging, utilisation d’un papier d’étiquetage recyclé, remplacement des capsules en aluminium par de la cire naturelle, utilisation d’un nouveau bouchon en liège bio non lavé au peroxyde, allègement du poids des bouteilles (20 tonnes de verre en moins sur 10 ans)… ça bouge !” Mais ce n’est pas tout ! Le domaine est également engagé dans une démarche d’agroforesterie et d’enherbement des sols. L’enherbement permet d’apporter de la matière organique et de lutter contre l’érosion des sols. Les vignerons replantent massivement des arbres (frênes, oliviers, pêchers, amandiers) sur les parcelles du domaine afin d’augmenter la biodiversité, le stockage du carbone et d’améliorer la vie du sol.

Cette philosophie se prolonge dans la cave, avec une vision le moins interventionniste possible : des levures indigènes et un peu de soufre uniquement à la mise en bouteille.

J’ai été touché par la confiance qu’Éric et Pauline avaient en leur fils de vingt-six ans et par leur indéfectible soutien à ses projets. Je connais beaucoup de domaines où la vision moderne des plus jeunes se heurte à une vision plus traditionnelle et où la transmission est moins sereine.

Il en résulte ici des vins gracieux, élégants, avec beaucoup de fraîcheur et de persistance aromatique. Le Chiroubles est tout en allonge, avec un nez délicat aux notes de pain d’épices et de cannelle, tandis que le Morgon, sur des schistes rouges, propose un vin plus concentré.

J’ai eu un véritable coup de cœur pour le Beaujolais Villages en blanc, un chardonnay d’une grande finesse dont l’expression m’a rappelé les vins du Mâconnais cultivés quelques kilomètres plus au nord.

Cerise sur le gâteau, les vins ne sont pas seulement bons, ils sont aussi beaux, puisque les étiquettes des vins de France sont faites par un artiste togolais et représentent des femmes dans les champs. Le domaine reverse une partie des bénéfices à l’artiste, mais aussi à une ONG togolaise qui œuvre pour les énergies renouvelables.

ça roule au Bowling du Rouergue

crédits photos alcapt média

Le Bowling du Rouergue à Rodez est une institution connue de tous, sa notoriété dépasse largement les frontières aveyronnaises, et pour ceux qui lisent cette lettre et qui sont venus me rendre visite il y a fort à parier que vous y êtes déjà passé car c’est  un endroit incontournable pour faire découvrir la gastronomie locale. Aller manger au bowling de Rodez ce n’est pas juste aller au restaurant c’est une sortie en soi, comme aller au cinéma ou à un concert. Et pour cause, le bowling c’est 600 couverts par jour en moyenne et 100 à 200 bouteilles de vins débouchées .

Qu’est ce qui fait le succès de cet établissement ? La très grande qualité de la viande cuite à la perfection, servie avec de l’aligot , des frites ou de la truffade .L’accessibilité de l’établissement adapté aussi bien aux groupes qu’ aux familles, où l’on peut faire une partie de bowling avant de manger un morceau, et où les enfants peuvent aussi jouer dans une superbe salle de jeu et se défouler sur un parcours et une piscine à balle. Aux manettes de cet établissement de renom, la Famille Bastide, Sandra et Jean-Pierre épaulés par le père Gilbert . Et c’est là que réside à mon avis la clef du succès ! La famille Bastide est une famille de restaurateurs qui a des mains en or , que vous mangiez au buron de Born sur l’Aubrac, au Glacier à Villefranche de Rouergue ou à la Route d’argent à Nasbinals une même famille et une même formule à chaque fois: des produits simples mais de grande qualité et des cuissons parfaitement maitrisées. Une équipe hyper disponible et réactive. C’est  Vianney Carrié le sommelier de l’établissement qui a a accepté de répondre à mes questions et de m’ouvrir les portes de cette belle cave. La famille Bastide est aussi pudique et discrète que travailleuse et professionnelle . Avant le bowling, Vianney a fait ses armes à l’hostellerie de Fontanges fort d’une mention sommellerie, il participe ici à la sélection des vins avec Jean-Pierre Bastide, lui même très amateur et connaisseur .

crédits photos alcapt média

Lorsque je lui demande comment est construite la carte des vins Vianney m’explique, qu’ils disposent en cave de plus de 150 références « La carte fait la part belle aux vins locaux, beaucoup de vins aveyronnais mais aussi énormément de vins du Languedoc: Pic Saint Loup et Terrasse du Larzac, c’est ce qui a le plus les faveurs de notre clientèle. Nous avons également quelques très belles bouteilles en cave pour les clients qui ont envie de se faire plaisir. » Contrairement à nombre d’établissements où la sélection aux verres est assez pauvre ici il n’en est rien. On a le choix aux verres entre quatre ou cinq rouges et presque autant de blanc. Un établissement de cet envergure est extrêmement sollicité pourtant la sélection se fait simplement et chacun à sa chance. « On déguste souvent le soir après le service. On fait parfois goûter à nos habitués et si un vin nous plait on peut alors l’intégrer à la carte. » Vianney et Jean-Pierre ont fait le choix d’une carte vivante qui évolue un peu tous les mois. Le bowling est un restaurant de viande, alors lorsque je l’interroge sur la proportion de vins rouges ouverts par rapport aux vins blancs , je ne suis pas surprise par la réponse « On débouche environ 80% de rouge contre 20% de blancs et rosés confondus. Et encore ce sont les vins moelleux et le moscato en blanc que nous ouvrons le plus souvent ».A priori conjuguer un établissement de cette taille avec les enjeux environnementaux actuels semble épineux pourtant c’est au cœur des préoccupations de l’équipe « En réalité on n’y est très attentifs, par exemple nous avons pris la décision pour limiter le gaspillage et la surconsommation de viande de commercialiser quasiment intégralement une bête avant d’en consommer une autre, mais c’est une décision qui n’est pas toujours comprise par la clientèle et nous devons faire de la pédagogie sur ce point. »

Quant à ses gouts personnels en matière de vin, Vianney est très ouvert mais à l’image de l’ établissement plutôt porté vers le vin rouge. « J’aime beaucoup le Languedoc et le Bordelais que je trouve injustement traité par les consommateurs aujourd’hui »

.Alors pour les extra-terrestres qui ne connaitrait pas encore cet établissement , n’hésitez pas à venir découvrir l’un des fleurons de la gastronomie locale.

Les coups de cœur d’Elodie

C’est en 2020 que j’ai fait la connaissance d’Elodie Martin, elle fut mon élève dans une formation de sommelier caviste dispensée par le Greta. Après une carrière épuisante dans le social, elle avait décidé de changer de métier. Amatrice de vins elle s’est donc tournée vers ce milieu . Je me rappelle d’une jeune femme, travailleuse investie mais doutant terriblement . Elodie se sentait nulle alors que de mon côté j’avais décelé son potentiel très vite. Petit à petit elle prit confiance en elle , et a affiné ses gouts en matière de vin et comme je l’imaginais aisément trouva sa place dans ce milieu. Elle travailla même quelques temps pour Vins d’Avenir. Elle est aujourd’hui la caviste de la cave du Fût Saint Martinois à Saint-Martin de Crau. C’est une cave de village où se côtoient des vins accessibles et traditionnels et les coups de cœur d’Elodie.

D’une grande loyauté, Elodie a toujours eu à cœur d’intégrer la sélection de vins de Vins d’Avenir, c’est particulièrement émouvant pour moi de travailler avec des gens que j’ai eu comme élève. Même si Élodie ne me dois rien et avait tout en elle je dois dire que je suis fière de la voir ainsi se déployer.

Si tu étais un vin rouge ?

Les perrottes du domaine Poulvarel en Costières de Nîmes

Si tu étais un vin blanc ?

Le clos du Clos Roussely

Si tu étais un vin pétillant ?  Le Champagne H.Blin

Si tu étais un accord mets et vin ?

Huitres et gin ( Pour changer du vin!)

Si tu étais un vin d’un autre pays ?

 La cuvée en blanc Etchart Argentine

Si tu étais une bière ?

Sweet Dreams microbrasserie Somi

Si tu étais un spiritueux ?

Un rhum arrangé  pongo piment gingembre miel

Si tu étais une appellation ou une région viticole ?

La Vallée du Rhône

Si tu étais un dessert ?

Fraises Chantilly 

Si tu étais un fromage ?

Une tomme de brebis

Si tu étais un moment de dégustation ?

Pas de moment particulier…Juste le partager avec les gens que j’aime

Si tu étais une recette de cuisine ?

 La daube polenta de ma grand-mère

Si tu étais une spécialité de chez toi ?

L’aïoli

Si tu étais un cépage ?

Une syrah

Maison Lacam

La maison de Lacam est située à Lardeyrolles au cœur de Ségala dans l’Aveyron. C’est la maison familiale de Virginie et Edwige Fabre, mais depuis trente ans cette magnifique bâtisse était inhabitée. Pourtant la vendre n’a jamais été envisagé par la famille. «  On n’arrivait pas à s’en défaire, ni nous, ni nos parents d’ailleurs. C’est un peu inexplicable, peut être que parfois c’est la pierre qui parle » m’explique Virgine , l’aîné de la fratrie. 

Dans cette maison leur mère a vécu jusqu’à ses 17 ans , et toutes deux y ont vécu enfants jusqu’à l’âge de huit ans. La maison est dans la famille depuis 4 générations, c’est un endroit refuge rempli de souvenirs, une madeleine de Proust pour les deux sœurs très attachées à leurs racines. Alors petit à petit a germé ce projet et elles ont décidé avec l’aide de leurs parents de faire revivre l’âme de cette maison . L’idée était donc de créer un lieu de vie pour passer un week-end ou des vacances en famille, entre amis.

 Pour cela Virginie et Edwige décident d’en faire une luxueuse maison d’hôtes. Lorsque je lui demande s’il n’aurait pas été plus facile de faire des gîtes indépendants les uns des autres, Virginie me répond «  Oui c’est vrai cela aurait été plus facile à la location, mais on voulait respecter le lieu, plusieurs gîtes c’était un peu comme le démembrer . On voulait qu’il puisse y avoir de grandes tablées familiale ou de copains. » S’en suit des mois et des années de travaux et de questionnements. Edwige et Virginie prennent toutes les décisions de façon collégiale, alors parfois cela prend un peu de temps de se mettre d’accord. « Il est certain qu’à plusieurs les décisions prennent plus de temps. Le projet aurait probablement été tout à fait différent si Edwige ou moi-même l’avions mené à bien seule, mais il aurait aussi été beaucoup moins aboutit. «  Comme le dit le proverbe africain « seul on va plus vite à deux on va plus loin ».

C’est une maison de plus de 400m², ouverte sur de grands espaces extérieurs et sur la nature environnante. L’ensemble de la maison est desservi par un grand escalier dans la Tour. Il semblerait que cette maison ait été construite sur les ruines d’un château…

Elle compte aujourd’hui sept chambres, toutes disposent de leurs propres salle d’eau et wc mais aussi un spa et une piscine. 

Soucieuses d’avoir une démarche environnementale responsable, les deux sœurs se sont questionnées sur la pertinence d’un spa et de la piscine « Cela nous a posé un vrai cas de conscience mais cela nous a semblé indispensable pour attirer la clientèle touristique que nous visions, en revanche pour compenser nous avons équipé la maison d’un système de chauffage et de rafraichissement géothermique . Aussi c’était important de restaurer l’édifice avec des matières nobles mais simples  tels que le bois ou la pierre cela reste une maison de campagne. Particulièrement attachées au territoire Virginie et Edwige ont souhaité que la maison soit un véritable faire valoir de la nature environnante et non l’inverse.

Bref la famille s’est retroussée les manches de nombreux week-end autour de la « Maison de Lacam » et a beaucoup travaillé pour offrir un lieu à la hauteur de leurs ambitions. 

Pourtant, ce qui m’a le plus touché en discutant avec Virginie, au delà de son enthousiasme communicatif c’est à quel point la restauration de cette maison a été aussi prétexte a de précieux instants familiaux « Je ne suis pas trop du genre à prendre des nouvelles régulièrement alors avoir ce projet a été l’occasion pour moi de voir beaucoup ma sœur et pour mes enfants leurs cousins. C’était toujours des moments joyeux et puis, au fur à mesure que nous restaurions la maison ma mère nous a raconté des souvenirs que je n’avais jamais entendu.  Je suis persuadée que nous allons encore en apprendre» se remémore Virginie. C’est une véritable transmission qui s’est opérée autour de la « Maison de Lacam »

 Si vous avez la chance comme moi d’habiter dans le coin, les deux sœurs organisent des portes ouvertes de la « Maison de Lacam » le samedi 15 juin à partir de 15h. Vous pourrez découvrir les lieux, vous restaurer sur place autour d’un aligot et même déguster des vins de la sélection Vins d’Avenir !

réservation: 06 49 66 64 98 ou contact@maisondelacam.com

Pour les autres Virgine et Edwige vous attendent à partir de cet été!

réservation sur https://maisondelacam.com/maison-lacam/reservation/

Guillaume, Yann, Paul, Francis, Albert et les autres…

Guillaume, est arrivé au Château Tour des Gendres en 2011 et a œuvré auprès de son père Francis et de son oncle Luc. C’est dans cette période de sa vie que j’ai fait sa connaissance. Lors d’un voyage rocambolesque en Chine il y a plus de dix ans, où nous avons tout de même beaucoup ri.  Son frère Paul le rejoint en 2013 et Yann Lecoindre arrive en 2017 en tant que maitre de chai.

Après 5 ans à travailler ensemble dans la vigne, au chai et au caveau, Guillaume, Yann et Paul ont maintenant la certitude que le trio fonctionne en parfaite symbiose.

Ils sont tous trois décidés à vivre une nouvelle aventure et à remettre de la vie dans le village.

C’est au début du mois d’avril que j’ai eu la chance d’aller rendre visiter à Guillaume, j’ai fait la connaissance de son merveilleux petit garçon mais aussi de son tout nouveau domaine. Un chai moderne et chaleureux où tout est pensé pour faciliter la vie du personnel mais aussi accueillir des visiteurs dans un cadre somptueux. J’ai eu envie d’en apprendre un peu plus sur la genèse de ce projet.

Comment est née l’idée de créer un autre domaine ?

Le domaine Tour des Gendres a été créé par mon oncle rejoint par mon père. Nous sommes ensuite arrivés au domaine mon frère et moi mais aussi mon cousin et ma cousine. On ne pouvait pas être deux fois plus. J’avais envie d’un domaine plus petit, j’ai proposé le projet à mon frère et Yann qui ont accepté.

Quelles sont les principales difficultés de cette aventure ?

C’est le temps de la mise en place. Notamment la création des bâtiments.
La deuxième difficulté c’est de devoir bâtir une stratégie de A à Z.

Qu’est-ce que cela implique humainement, financièrement et commercialement ?

Humainement cela m’apporte énormément de liberté et nous avons la chance de bénéficier de l’expérience acquise à la Tour des Gendres.

Financièrement c’est aussi un challenge, il a fallu trouver des partenaires financiers. Commercialement en revanche nous avons la chance de bénéficier du réseau commercial de la Java du Sud-ouest, en contrepartie toutes ces nouvelles cuvées apportent un certain dynamisme au groupement.

Quels sont tes projets à court, moyen et long terme ?

Pérenniser l’entreprise, m’amuser dans l’élaboration des vins et à plus long terme le graal ultime serait que mes enfants reprennent mais cela ne m’appartient pas.

La nouvelle maison d’Audrey Rouanet

Le vignoble du domaine Rouanet Montcélèbre a été acheté par Bernard Rouanet, en 1987 et offert à Annie sa femme, pour la naissance de leur fille Audrey.  Après des études en œnologie, Audrey apprend à vinifier à l’étranger, puis elle décide en 2012 de mettre à profit ses connaissances et de s’investir dans le domaine familial, à l’époque dans une santé financière assez précaire. Elle crée une gamme, convertit le domaine à l’agriculture biologique, affine le style des vins et prend son bâton de pèlerin pour aller chercher des clients. Ses efforts payent. Le domaine se redresse et trouve sous son impulsion une nouvelle identité.
C’est à ce moment-là que nous nous rencontrons, il y a sept ans, lors d’un déplacement professionnel à New York. Je venais d’avoir mon premier enfant et elle était enceinte de sa fille. Nous avons tout de suite sympathisé. Pendant que nous assurions dégustations et rendez-vous professionnels nos conjoints se sont tenus compagnie pour visiter New York, ils nous rejoignaient le soir pour déguster le fleuron du vignoble languedocien. Il y a pire comme vacances…

Bref, nous sommes devenues amies et j’ai tout de suite su que ses vins intégreraient la sélection de vins d’avenir.

En 2017, Audrey perd son papa lors d’un accident tragique pendant les vendanges. Épaulée par sa mère, elle prend alors seules les rênes de l’exploitation. Malheureusement travailler quotidiennement avec le souvenir de ce drame se révèle trop douloureux.

Aujourd’hui, elle fait le choix de tracer son sillon seule avec un nouveau domaine, la nouvelle maison et une nouvelle gamme. Elle a accepté de m’expliquer pourquoi avec beaucoup de franchise et de courage.

Comment est née l’idée de créer un autre domaine ?

Après avoir œuvré pour le domaine familial durant 11 ans, me voilà partie pour voler de mes propres ailes. La décision n’a pas été simple à prendre, mais poser le poids du drame de Papa, quitter cette cave et me reconstruire est devenu une nécessité…

Toujours en Minervois, à Azillanet à quelques kilomètres au pied de Minerve, nous avons décidé d’acheter notre nouvelle maison, d’y installer notre petite famille et d’y construire mon nouveau projet…

Quelles sont les principales difficultés de cette aventure ?

Il y en a beaucoup. Cela représente un gros investissement dans une période incertaine, difficile. Je change d’échelle c’est un domaine plus petit avec des rendements plus petits sans pour autant que mes frais soient diminués. Par exemple la MSA que je produise 20 000 ou 100 000 bouteilles me prend la même chose.

Par ailleurs, avec des rendements beaucoup moins importants je ne peux plus pratiquer les mêmes tarifs. Je suis contrainte de relever mes prix. C’est un risque. Je m’expose à ce que certains clients ne comprennent pas bien ma démarche.

Qu’est-ce que cela implique humainement, financièrement et commercialement ?

Humainement j’ai été très touchée de voir le soutien que cela a soulevé. Cette nouvelle aventure m’a permis de rencontrer de nouvelles personnes qui m’ont apporté un soutien salutaire. Financièrement c’est difficile car je n’ai pas vendu mon domaine ou des parts du domaine donc je repars à zéro avec très peu de trésorerie. Et commercialement il y a tout à réécrire aussi. Il me faut trouver de nouveaux marchés adaptés à ma nouvelle structure.

Quels sont tes objectifs à court, moyen et long terme ?

D’abord pérenniser cette nouvelle structure et à plus long terme reprendre vraiment du plaisir à effectuer mon travail. Je suis intimement convaincue qu’avec les vieux cépages je peux faire de la dentelle et parvenir encore à me surprendre moi-même mais il me faut d’abord parvenir à avoir l’outil adéquat !

« Qui sème la misère, récolte la colère »

C’est ce genre de banderolle que l’on a pu trouver ces dernières semaines lors des manifestations d’agriculteurs. Les agriculteurs sont une corporation que l’on entend peu alors comme beaucoup j’ai été surprise de l’ampleur du mouvement et de sa véhémence.

Plus récemment, lors d’une discussion avec l’un des vignerons de vins d’avenir nous parlions tarifs quand il lacha cette petite phrase «  Tout le monde soutient les agriculteurs mais personne n’est prêt à payer plus cher »

J’ai donc voulu savoir si les vignerons eux-mêmes soutenaient les revendications des agriculteurs. Globalement oui. Ce qui semble faire l’unanimité est une meilleure revalorisation de leur travail. Aujourd’hui, 18% des agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté . Lorsque j’interroge Amelie Bonnard c’est le premier point qu’elle soulève « Il n’est absolument pas normale aujourd’hui, de ne pas pouvoir vivre de notre travail. » . Surtout au regard du nombre d’heures travaillées. Comment en est-on arrivé là ?

Depuis 30 ans, le revenu net de la branche agricole a baissé de 40% en France en euros constants. Dans le même temps, le nombre d’exploitations agricoles a diminué de 60%.  Le revenu net par actif agricole non salarié a donc augmenté . Pourtant ces chiffres masquent de grandes disparités. L’argent se concentre dans de très grosses exploitations et la situation des plus petits devient de plus en plus précaire.

Les agriculteurs réclament le respect stricte des lois egalim censées réguler les prix . Pourquoi jusqu’à présent cette loi n’est-elle pas simplement appliquée ? 

L’agriculture souffre beaucoup de la concurrence internationale, heureusement sur ce point la viticulture semble encore privilégiée. Les français boivent du vin français.

Pour autant, les vignerons n’épousent pas toutes les revendications de la FNSEA. C’est ce que m’explique Pascal Lambert. « Je ne me sens pas spécialement représenté par la FNSEA mais en l’occurrence ils ont le mérite d’avoir jeté un pavé dans la mare. Mais sur les questions environnementales je ne les suis pas. Cela fait vingt cinq ans que nous œuvrons au domaine pour assainir les sols. Hors de question de revenir en arrière ».

Même son de cloche pour Amélie au Mas Baudin «  Je ne comprends pas en revanche que sur l’arrêt de certains produits chimiques nous revenions en arrière. Pourquoi se calquer sur l’Espagne alors que nous avons une agriculture plus verte. C’est l’inverse que nous devrions faire. »


En revanche tous semble désabusé face à l’inaction des pouvoirs publique. « Il y a des effets d’annonce , des effets de manche mais à la fin rien n’est appliqué ».
Pourtant les vignerons ne perdent pas espoirs  » Je crois plus a l’éducation du consommateur, qu’aux actions du gouvernement. Avec d’autres, nous avons ouverts un magasin de producteurs pour pouvoir être au contact direct du client final.  »  m’explique Amélie


Comme eux, je crois plus aux actions citoyennes qu’aux actions politiques. Ne dit-on pas souvent que l’on vote avec sa carte bancaire.