La vinification au domaine Delacroix Kerhoas

Après les vendanges, les vignerons s’affairent dans leur cave pour la vinification. Dans les cuves, le moût, c’est-à-dire le jus de raisin, devient du vin grâce aux levures qui transforment les sucres en alcool. C’est la fermentation alcoolique. La majorité des vignerons, en conventionnel ou en bio, utilisent du dioxyde de soufre (SO2)- les fameuses « sulfites »- à différentes étapes de la vinification. Antiseptique, le SO2 agit contre le développement des microorganismes susceptible d’altérer le vin. Antioxydant, il protège le moût puis le vin d’une oxydation trop forte.

Pourtant, au domaine Delacroix Kerhoas, pas une goutte de soufre n’est utilisée en cave. « Ici, tout est vinifié sans sulfite » me confirme Thibault Kerhoas. « Pas de soufre, pas de collage, pas d’élevage en barrique non plus. Nous ne voulons pas maquiller le vin. » Le domaine est certifié bio et Nature et Progrès, un label particulièrement exigeant. Thibault Kerhoas est de ces vignerons qui souhaitent produire des vins avec le moins d’intrants chimiques possibles.

Pourtant, alors que pour lancer la fermentation alcoolique certains vignerons- ils sont nombreux parmi la sélection de Vins d’Avenir- s’en remettent uniquement aux levures indigènes, celles naturellement présentes sur la pruine des raisins et dans les chais, ici, on ajoute dans le moût des levures exogènes, achetées dans le commerce. Dans le jargon on parle de « levures sèches actives » (LSA). Thibault Kerhoas explique : « le risque, lorsque l’on réalise une fermentation sans soufre, c’est que le vin s’oxyde plus rapidement. Plus la fermentation démarre tard, plus le risque croît. Les levures sont un moindre mal par rapport au SO2. Les gens en mettent bien dans leur salade, tandis que le soufre, lui, est un poison ! » Voilà qui est dit. Mais c’est quoi, au juste, une levure ? « Une levure est un champignon unicellulaire apte à provoquer la fermentation des matières organiques. Les levures sont employées pour la fabrication du vin, de la bière, des alcools industriels, des pâtes levées ou encore des antibiotiques. » Thibault prépare un « pied de cuve » : il introduit dans une cuve un levain pour favoriser la multiplication des levures et ensemencer ensuite les sept autres cuves. Les boulangers se servent de la même levure, saccharomyces cerevisiae, pour lever leur pâte. Pour le pain comme pour le vin, utiliser des levures sélectionnées permet d’obtenir un résultat constant.

Pour le reste, quelques délestages (le moût est pompé et entièrement transvasé dans une autre cuve), quelques remontages (le jus est pompé en bas pour être versé en haut, sur le chapeau de marc) pour enrichir le vin puis on le laisse tranquille jusqu’à la mise en bouteille qui aura lieu en mars.

Thibault reste curieux et, si sa philosophie et sa technique ont fait leurs preuves, il aime toujours apprendre de manière empirique. Chaque millésime apporte son lot de nouveautés. Cette année, il a essayé une macération semi-carbonique. Cette méthode consiste à mettre des grappes de raisins entières, vendangées manuellement, non éraflées et non foulées, dans une cuve hermétique saturée de CO2. Il se produit alors une fermentation intracellulaire à l’origine d’arômes très fruités. Une nouvelle cuvée va également voir le jour à la fin de l’automne : une Roussane vinifiée en méthode traditionnelle (celle que l’on n’a plus le droit d’appeler champenoise).

Après dégustation de l’intégralité des cuves, pas de doute, au domaine Delacroix Kerhoas, 2019 est un beau millésime : fruité, expressif, avec une étonnante acidité malgré la chaleur de cet été.

Les nectars bio de la Mère Minard

Niché sous les arches de la place du marché à Saint Quentin-la-Poterie, charmant village à dix minutes d’Uzès, le Caveau de la Mère Minard est un lieu que j’affectionne tout particulièrement et qui est en passe de devenir l’un des bastions des vins bios dans le Gard.

Nicolas Chevrier et Illan Hubner ont réussi, en un peu plus deux ans, à faire de cette cave un endroit chaleureux, qui compte 400 références, dont près de 90% sont en bio ou en nature. Ces deux là sont connaisseurs et convaincants. Loin d’avoir un discours mercantile, ils connaissent personnellement la plupart des vignerons bios de la région et ils n’ont de cesse d’arpenter les salons pour les rencontrer. Et, cerise sur le gâteau, ils ont eu dès le départ la volonté d’inscrire dans leur gamme un très large choix de bières. Là encore, c’est une sélection très réussie et éclectique d’une centaines de noms où se croisent des valeurs sûres comme des bières belges et de nombreuses bières locales que comptent le Gard et l’Hérault.

Illan et Nicolas ont l’intelligence de laisser leur chance à tous ceux qui viennent frapper à leur porte. Ils goûtent beaucoup et ils sont toujours prêts à se laisser surprendre. Je suis  donc très heureuse de la confiance qu’ils accordent à la sélection Vins d’Avenir et je vous invite à découvrir cet endroit les yeux fermés !

Les vendanges au château Cohola

Au château Cohola, sur des terrasses exposées plein ouest dans le superbe massif des dentelles de Montmirail, les vendanges 2019 ont démarré le 9 septembre. J’y ai passé une matinée, au cours de laquelle nous avons vendangé de belles grappes, parfumées et saines, des cépages blancs Viognier, Grenache blanc, Marsanne et Rousanne :

Les raisins sont récoltés manuellement dans des sceaux puis déposés dans de petites cagettes pour être acheminés jusqu’au chai :

Jérôme Busato et de sa femme Cheli Alberca souhaitaient planter des cépages précoces et tardifs qui arrivent à maturité en même temps pour pouvoir les récolter ensemble et obtenir des jus qui soient riches et mûrs, tout en conservant de la fraicheur et de l’acidité.

Arrivés au chai, les raisins sont entièrement égrappés (on dit aussi éraflés, c’est-à-dire que les grains de raisin sont séparés de la rafle, le support pédonculaire vert et ligneux) et foulés (les baies sont éclatées pour en extraire le jus).

Le moût est ensuite laissé au contact de la pellicule du raisin. Au bout de 24h, la vendange est pressée avec douceur pour ne pas écraser les pellicules et pépins fragilisés. Cette « macération pelliculaire » permet d’augmenter le potentiel aromatique du futur vin puisque c’est dans la pellicule que se trouvent l’essentiel des précurseurs d’arôme du vin.

Le billet de Réjane #1

Un an !

Un an que j’ai créé Vins d’Avenir 

Une année d’émerveillement et de bonheur à parcourir les vignobles, à renouer contact avec la nature et à rencontrer des vignerons, des cuisiniers, des cavistes, des gens qui aiment leur métier et dont la passion est contagieuse.

Bien sûr, j’ai été confrontée à toutes les difficultés que peut rencontrer un jeune chef d’entreprise : une très forte concurrence et un contexte économique assez difficile. C’est  un travail qui nécessite une grande disponibilité et une grande polyvalence. J’endosse tour à tour les rôles de commerciale, acheteuse, livreuse, comptable… À l’heure du bilan et même si je ne suis qu’aux prémices de cette aventure, je ressens une exaltation très forte à poursuivre le chemin.

Il est encore tôt pour tirer des conclusions mais le parti pris d’avoir un catalogue de vins bios se révèle une vraie richesse. Les consciences s’éveillent et la culture bio est au cœur des préoccupations des consommateurs.

Pourtant, le travail de pédagogie à effectuer auprès des clients, pour expliquer ce qu’est un vin bio et les coûts de la culture biologique est considérable. En fonction des régions viticoles, les différences peuvent s’accentuer fortement et les différences de prix entre un vin bio et un vin conventionnel peuvent être non négligeables.

La Champagne par exemple est la région qui produit les vins les plus technologiques au monde. C’est aussi la région où le négoce règne en maitre avec 70% des ventes. La culture bio coûte en moyenne 30% de plus à produire. Le climat champenois complexifie le travail du vigneron bio. Un champagne bio, de vigneron, comme ceux de Barrat Masson, sera donc forcément plus cher qu’un champagne conventionnel de négoce. Mais il sera aussi meilleur pour la santé, riche d’une histoire humaine et de l’empreinte d’un terroir. Il me semble que cela justifie de le payer quelques euros de plus.

Heureusement, il est des régions plus favorables à la culture biologique et c’est le cas de la vallée du Rhône. Les deux nouveaux venus de la sélection, le château Cohola à Sablet et le château Simian à Piolenc, en sont issus. On oublie trop souvent que le Rhône méridional produit aussi de grands vins blancs. Le Sablet du premier et le Châteauneuf-du-Pape du second nous le rappellent. J’ai aussi le plaisir de vous annoncer que je vais représenter les élégants vins d’Alsace du domaine Rieflé.

J’espère prendre le temps d’instaurer un rendez mensuel pour vous raconter l’évolution de Vins d’Avenir et, d’ici là, je vous souhaite un bel automne 2019.