La polyculture, une pratique ancestrale qui a de l’avenir

Raisins mais aussi abricots, olives ou encore miel, plusieurs vigneron.ne.s Vins d’Avenir pratiquent la polyculture. Ils nous expliquent les avantages agronomiques et économiques de leur choix.

Exemple d’agroforesterie. @ IFV.

La spécialisation des exploitations agricoles débute au milieu du XIXe siècle. D’une polyculture vivrière elles passent à une monoculture souvent intensive et soumise à des impératifs courtermistes de rentabilité. La viticulture ne fait pas exception. Le modèle des vignes arborées, diffusé en Gaule par les Romains, s’efface lui aussi avec la mécanisation, la spécialisation et les exigences de productivité, la doxa agronomique considérant alors que la vigne ne doit souffrir d’aucune concurrence sous peine de voir ses rendements baisser. Avec l’apparition des engrais de synthèse après la Seconde guerre mondiale disparaît l’intérêt d’élever des bêtes pour le fumier qui fertilisait les plants.

Depuis quelques années, les initiatives pour faire cohabiter la vigne avec d’autres cultures se multiplient, même s’il reste difficile de quantifier le phénomène.

Lorsque Thibault Kerhoas reprend le domaine Delacroix Kerhoas (Gard), il décide de créer un verger multi fruits bio. Et ce pour plusieurs raisons : « D’abord par goût personnel : j’aime les fruits et je rêve d’une agriculture qui soit aussi vivrière pour ma famille. J’aimerais d’ailleurs aller plus loin et développer dans un futur proche un petit élevage en plein champ de volaille ou de cochons. Ensuite parce que c’est un avantage économique d’avoir deux cultures, notamment en cas de gel ou de maladies. Cela permet d’avoir une deuxième source de revenus. »

Au Mas Baudin (Gard), les parents d’Amélie et Vincent Bonnard ont diversifié dès le début leur exploitation. « Mes parents avaient planté en autofinancement des tomates, des pommes de terre, des pêches et des abricots mais c’était économiquement très difficile les années avec du gel. Mon père a eu envie de planter de la vigne et d’amener les raisins à la cave coopérative pour varier les revenus. Il souhaitait aussi nous transmettre un patrimoine mieux valorisé puisque la vigne a plus de valeur foncière. Puis, dans les années 2000, nous avons décidé de planter des oliviers, tout simplement car nous en avions marre de consommer de mauvaises huiles. »

Autre atout de la polyculture : les périodes d’activité se complètent. À la vendange des raisins succède par exemple la récolte des olives. Cela permet d’avoir recours à du personnel qualifié et formé pour les deux cultures et moins à des saisonniers. Mais c’est aussi du travail supplémentaire, comme le souligne Jérôme Busato du Château Cohola (Vaucluse) où se côtoient des vignes, des oliviers mais aussi des abeilles. « On a décidé de produire du miel car on a eu envie de toucher à l’élevage. On pourrait parler de troupeau d’abeilles. Et l’élevage c’est une autre forme de pensée que le végétal. Les problématiques sont différentes. »

La polyculture compte aussi parmi les principes de l’agroécologie. Elle crée un cercle vertueux, plus respectueux de l’environnement. Au Mas Baudin, les résidus de pressurage des olives ainsi que l’eau issue du pressurage sont utilisés comme un amendement très riche pour les vignes.

La diversité des cultures diminue la susceptibilité à la maladie, l’un des problèmes majeurs liés à la monoculture. Thibault Kerohas confirme : « Les arbres constituent une barrière de protection naturelle face aux nuisibles. Un hectare d’abricotiers au milieu des vignes limite les ravageurs. En outre, ils abritent des chauves-souris et des oiseaux qui participent à la biodiversité et protègent indirectement la vigne. Les chauve-souris par exemple se nourrissent des papillons responsables du ver de la grappe. » Et une biodiversité bien installée permet de réduire drastiquement l’utilisation de béquilles chimiques. Naturellement, pour que des animaux s’installent dans les cultures, il faut a minima être en agriculture biologique et bannir les produits tueurs en « -icides » (pesticides, insecticides et autres fongicides).

Ajoutons que la vitiforesterie nourrit les sols en apportant de la matière organique et qu’elle protège la vigne du gel et de la canicule.

Les avantages de la polyculture sont nombreux et ils s’inscrivent dans une volonté forte de la part du vigneron ou de la vigneronne de développer une agriculture durable. Des pratiques que nous suivons de près à Vins d’Avenir…

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